Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/508

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

avec du plomb à daim, vous pourrez en tirer plus d’un sans grand effet, car ce sont des oiseaux robustes et qui ont la vie dure.

Pour se faire une juste idée de l’élégance et de la beauté qui les distinguent, il faut les contempler lorsque, sans se douter qu’on peut les voir, ils se balancent en paix à la surface de quelque étang solitaire : leur cou, que d’ordinaire ils tiennent roide et presque droit, décrit alors les courbes les plus gracieuses, tantôt penché en avant, tantôt s’inclinant en arrière au-dessus du corps ; d’autres fois ils l’allongent, plongent un instant leur tête sous l’eau pour y puiser, et par un effort subit, rejettent sur leur derrière et sur leurs ailes un flot limpide qui retombe et roule en scintillants globules tout le long de leurs plumes. À ce moment l’oiseau bat des ailes, fait rejaillir les ondes, et, comme ivre de plaisir, il s’élance et glisse sur le liquide élément, avec une merveilleuse agilité. Lecteur, figurez-vous une troupe de cinquante Cygnes se jouant ainsi sous vos yeux, et vous vous sentirez comme je me suis souvent senti moi-même, devant un tel spectacle, le plus heureux et le plus exempt de souci de tous les mortels !

Quand il nage sans être inquiété, le Cygne montre la plus grande partie de son corps au-dessus de l’eau ; mais dès qu’il redoute le moindre danger, il s’y enfonce beaucoup plus. S’il se repose en se réchauffant au soleil, il retire en arrière un pied, qu’il étend de toute sa longueur, et dans cette singulière posture il reste quelquefois une heure sans bouger. Lorsqu’il veut aller vite, le joint du tarse, ou si vous préférez, le genou