Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/184

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bles, c’est-à-dire permettant le passage du filanjana. Ces routes ont de 1 m. 50 à 2 mètres en dedans des fossés et, en dehors des fossés, 1 mètre ou 2 sont débroussaillés. Pour ces travaux il a été alloué 1130 francs qui ont servi à acheter des outils et à donner des gratifications à quelques chefs. Évidemment les routes sont construites à bon marché : 43 centimes le kilomètre. À Esira, petit poste dépendant de Befotaka, le sergent chef de poste n’a pu amener que trente bourjanes sur les chantiers ; il demande l’autorisation de mettre à la barre le chef Retzambo, pensant ainsi faire venir des travailleurs plus nombreux. Le lieutenant Baguet accorde l’autorisation, prescrit à son subordonné de bien prendre en mains les gens d’Esira et lui envoie, pour payer les travaux, 50 francs à répartir ainsi : 15 francs au caporal européen, 10 francs aux deux tirailleurs surveillants, 25 francs aux trois chefs de tribus ; le reste… (il n’y en avait pas) était destiné aux travailleurs.

En juin 1904, seize villages du district de Bafotaka travaillaient aux routes. Quoi qu’il ait prescrit de secouer très durement les tribus d’Esira, quoiqu’il ait écrit à Ranotsara qu’il n’y avait pas lieu d’écouter les doléances des indigènes à propos des routes « sinon, disait-il, nous n’aurions qu’à partir », le lieutenant Baguet ne croyait pas, malgré le mécontentement déterminé par les travaux, à un soulèvement possible.

Fait plus grave : un mépris absolu et scandaleux de la vie humaine s’étale dans toute l’administration du district de Midongy.