Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/213

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découlaient, pour une forte part, de la conception coloniale du gouvernement métropolitain.

Cette conception, je l’ai déjà dit, était simple et… ménagère des deniers de l’État : les colonies ne devaient rien coûter à la Métropole et trouver chez elles les ressources nécessaires à leur organisation. Au contribuable français on demanderait uniquement les sommes employées à l’entretien d’effectifs militaires. Tout le reste : traitement des fonctionnaires civils, crédits destinés à la police, à la justice, aux travaux publics, à tout ce qui constitue l’administration, à tout ce que coûte l’outillage économique, devait être payé par les revenus des colonies elles-mêmes, c’est-à-dire, je ne saurais trop le répéter, par les impôts exigés des indigènes, directs ou indirects.

De cette conception simpliste est résulté que partout la chasse à l’impôt fut l’occupation incessante primordiale des fonctionnaires locaux. L’indigène est pressuré pour qu’il fournisse l’impôt en argent, pressuré pour qu’il apporte l’impôt en nature ; c’est lui qui doit assurer les corvées de travaux publics, livrer à bas prix des denrées alimentaires, etc., etc.

Ce système, très naturellement, a partout éloigné l’indigène de l’Européen, quand il ne l’a pas transformé en révolté. Cet Européen, comment l’indigène pouvait-il le voir sans haine ?

Hier le naturel vivait tranquille dans son village, travaillant uniquement pour ses besoins, c’est-à-dire travaillant peu dans un pays où souvent les produits presque spontanés du sol suffisent à la nourriture, dans un pays où la chasse, la pêche sont fructueuses, où le climat rend inutiles les vêtements et les habitations confortables.