Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/48

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tion de demeurer, l’un des indigènes, plus violent que les autres, la menaça de sa hache, mais hésitant devant la résolution de cette femme, il n’abattit pas son arme, et la somma plus énergiquement de partir.

La résistance était impossible : les six tirailleurs du poste, enfants ou frères des indigènes de la région, n’étaient pas sûrs ; ils auraient refusé de tirer sur leurs parents, et, l’eussent-ils voulu, n’auraient pu lutter efficacement. Le poste ne possédait que quelques cartouches ; Hartmann, prévoyant l’attaque de Manantenina, y avait emporté l’approvisionnement de Ranomafana. Le Commandant Leblanc, de Fort-Dauphin, prévenu depuis six jours de la nécessité de ravitailler Ranomafana en cartouches, n’avait rien envoyé. Même avec des munitions, qu’auraient pu huit fusils dans un poste dépourvu de parapet, de palissade, ne présentant aucune valeur militaire et que l’incurie du commandement, cent fois avisé, avait laissé dans cette situation dangereuse ?

Le nombre des indigènes entourant, puis envahissant le poste, croissait de minute en minute. Il s’augmentait de recrues nouvelles provenant de villages éloignés. Cette tourbe menait un tapage assourdissant, frappant sur les tam-tam, soufflant dans les konkas (coquilles), brandissant des sagaies et des haches, tirant des coups de feu, poussant des cris de mort, quelques-uns se livrant à des danses échevelées.

Mlle B… se décide à quitter Ranomafana, véritablement intenable, et abandonnant tout ce qu’elle possédait : vêtements, objets divers, bijoux, etc… elle ne garde qu’une préoccupation : emporter la caisse du poste. En la quittant, Hartmann