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Page:Augier - Théatre complet, tome 1.djvu/352

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Entre la honte et moi mettre cette muraille ?
Va, va, j’ai de la force, et j’ai su le prouver.

Adrienne.

Je dois te parler ferme afin de te sauver.
Qu’as-tu fait pour compter ainsi sur ton courage ?
Qu’as-tu fait pour te croire au-dessus de l’orage ?
Ton amour n’a pas su se taire seulement !
Tu crois bien beau l’effort d’exiler ton amant ?
Mais je te le disais tout à l’heure, ces femmes
Que le monde poursuit justement de ses blâmes,
Ces femmes-là, ma chère, ont toutes au début
Honoré leur devoir de ce mince tribut.
Veux-tu leur ressembler ? Soit. Estime-toi forte,
Et laisse le danger s’établir à ta porte.

Gabrielle.

Si Stéphane pourtant s’en allait pour toujours ?

Adrienne.

Les départs les plus sûrs sont sujets aux retours.
Mais ne revînt-il pas, ce serait sa ruine,
Et tu ne le veux pas ruiner, j’imagine !

Gabrielle.

Et moi qui n’ai pas eu cette pensée ! Oh ! oui,
C’est lui qu’il faut sauver et non pas moi ; c’est lui !
Tu devais commencer par ce mot, Adrienne.
Mais son consentement, crois-tu que je l’obtienne ?
Ce triste mariage, hélas ! est son salut,
C’est vrai ; mais il faudrait aussi qu’il le voulût.

Adrienne.

Il le voudra, s’il croit à ton indifférence.