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Page:Augier - Théatre complet, tome 1.djvu/403

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Gabrielle.

Stéphane ?…Il est parti pour ne rentrer jamais.
Il est parti, Monsieur, parce que je l’aimais.
Cette femme, c’est moi — Que mon sort s’accomplisse :
Je ne murmure pas contre votre justice.

Elle tombe à genoux.
Julien.

Relève-toi, ma fille. Ai-je vraiment le droit
D’être un juge orgueilleux et dur à ton endroit ?
Dans ton égarement d’un jour, je me demande
Lequel de nous, pauvre âme, eut la part la plus grande,
Lequel doit s’accuser, toi qui m’as oublié,
Ou bien sur mon trésor moi qui n’ai pas veillé ;
Moi qui, dans mon travail absorbé sans relâche,
M’imaginant ainsi remplir toute ma tâche,
Sans m’en apercevoir ai perdu jour par jour
Les soins et le respect, ces gardiens de l’amour,
Et qui suis devenu dans ma lutte obstinée
Un autre homme que l’homme à qui tu t’es donnée.
Tu le vois, mon enfant, dans ce pas hasardeux
Tous deux avons failli ; pardonnons-nous tous deux.

Gabrielle.

Oh ! vous êtes clément comme un Dieu !

Julien.

Oh ! vous êtes clément comme un Dieu ! Comme un père.
Mais je regagnerai ton amour, je l’espère…

Gabrielle.

Me rendrez-vous le vôtre ?

Il l’attire dans ses bras.