Page:Augier - Théatre complet, tome 1.djvu/81

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Mais vous, dont l’âme encor n’a pas de flétrissure,
Vivez longtemps, vivez tranquille autant que pure ;
Soyez mère féconde aux bras d’un autre époux ;
Et que puissent les dieux, plus cléments envers vous,
Unir à votre part d’heureuse destinée
La part qu’ils me devaient et ne m’ont pas donnée !
Dites-vous quelquefois, au milieu du bonheur,
Qu’en vous voyant plus tôt j’aurais été meilleur ;
Que… Mais je perds courage en cet adieu suprême.
Conservez ma mémoire…

Il prend la coupe et la porte à ses lèvres.
Hippolyte.

Conservez ma mémoire…Arrêtez ! je vous aime !

Clinias, laissant tomber la coupe.

Grands dieux ! l’ai-je entendu ? Vous… vous… je suis aimé !

Hippolyte.

Il le faut bien.

Clinias.

Il le faut bien.L’espoir ne m’est donc plus fermé !
Un bonheur inconnu vient d’entrer dans mon âme.
Oh ! je veux être heureux, je veux vivre ! ô ma femme !

Hippolyte.

Mes parents sont à Chypre.

Clinias.

Mes parents sont à Chypre. Eh bien, tant mieux ! quittons
Ce désert qu’on appelle Athènes, et partons.
Adieu, mes bons amis ! Adieu, ville maudite !
Ta mère m’aimera, n’est-ce pas, Hippolyte ?
Une famille à moi ! Quelle joie ! et comment
Ai-je pu jusqu’ici vivre différemment ?