Page:Augier - Théatre complet, tome 4.djvu/163

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Pierre.

C’est si bête à raconter, un amour sans espoir.

Michel.

Pourquoi donc sans espoir ? Tu n’es pas joli, joli, mais enfin tu es plus joli que moi, et je ne me trouve pas laid. Elle est donc bien dégoûtée ?

Pierre.

Elle ne sait seulement pas que je l’aime, et elle ne le saura jamais.

Michel.

Qu’est-ce que c’est que ça ?

Pierre.

Elle est ici depuis huit jours, elle part demain et je n’aurai pas l’occasion de la revoir.

Michel.

Diable ! diable ! c’est fort bête, ce qui t’arrive là… Te voilà du chagrin sur la planche pour tout l’hiver.

Pierre.

Ne t’inquiète pas ; si la tête me tourne, il y a un garde-fou… je me suis juré de l’oublier dès que je ne la verrai plus, et je l’oublierai. Tu me connais.

Michel.

Mais alors quel singulier plaisir trouves-tu ?…

Pierre.

À me donner le vertige quand je me sens en sûreté ? Rien n’est plus enivrant. Tu ne comprends pas ça, toi, l’homme fort ; et je t’étonnerais bien si je te disais que