Page:Augier - Théatre complet, tome 4.djvu/208

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d’autant plus facile qu’il prête le flanc. Personne, j’imagine, ne supposera que notre mariage ait manqué par son refus ? Il passera pour un coureur de dot malheureux, voilà tout. Cela vous contrarie-t-il ?

La Palude.

Non… oh ! non ! c’est-à-dire… ce pauvre Léopold… c’est mon ami d’enfance, et je serais désolé… mais il l’aura bien mérité. Vous êtes bien sûre au moins que vous ne l’épouserez pas ?

Madame Bernier.

À quoi bon ? N’avons-nous pas un homme dans la maison ?

La Palude.

C’est juste, il ferait double emploi. Ce brave Pierre ! Il paraît que vous êtes contente de lui ?

Pierre ferme brusquement son livre.
Madame Bernier.

Autant qu’il l’est de nous, j’espère.

La Palude.

Et moi qui m’opposais à ce mariage-là… (Se tournant vers Pierre.) Oui, jeune homme, je ne m’en cache pas, je vous ai fait la guerre ; mais c’était dans votre intérêt.

Pierre, se levant.

Vous êtes bien bon.

La Palude.

Non, vous aviez de l’avenir, je l’ai toujours dit ; mais il vous fallait l’aiguillon de la pauvreté. Tout le monde n’est pas de force à supporter l’atmosphère amollissante de la fortune : pour y produire, il ne faut pas moins que