Page:Augier - Théatre complet, tome 4.djvu/449

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Henri.

Elle l’est assez pour deux.

Charrier.

Assez pour deux ! Il suffit d’introduire cette petite phrase-là dans la maison la plus solide pour la ruiner en moins de trois générations. Non ! non j’ai tiré ma famille du néant par mon travail ; n’espère pas que je prête jamais les mains à sa déchéance.

Henri.

Mais si ce mariage la diminue d’un côté, il la relève de l’autre ; Sergine a déjà un nom illustre, et toi-même tu tires vanité de le connaître.

Charrier.

C’est-à-dire que je suis bien aise de l’avoir à ma table et de l’offrir à mes convives. C’est un homme de mérite, je n’en disconviens pas, et sa fréquentation prouve que je ne suis pas moi-même un imbécile. Mais si j’en tire vanité, comme tu dis, c’est tout ce que j’en veux tirer. On admet ces gens-là dans son salon ; dans sa famille, jamais ! J’en suis fâché pour Clémence, elle n’avait qu’à mieux placer son affection. Je ne comprends même pas qu’elle se soit amourachée d’un homme en puissance de femme.

Henri, vivement.

Elle n’a jamais rien su de sa liaison avec la marquise !

Charrier.

Comment alors se figurait-elle qu’il n’était pas libre ?

Henri.

C’est moi qui lui avais dit, pour couper court à toute