Page:Augier - Théatre complet, tome 7.djvu/130

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Deux millions sortant de la poche d’un honnête homme et apportés par une charmante jeune fille…

Hortense.

Charmante ? Une petite sotte, affolée de noblesse, qui déplore la mésalliance de sa mère, qui méprise son père, et qui d’ailleurs a bien raison…

Jean.

Je vous arrête, ma chère. M. Jonquières n’a-t-il pas une réputation excellente ? 1

Hortense.

Oh ! il n’a pas subi la moindre condamnation, je l’avoue. Il est reçu partout, mais… il n’est accueilli nulle part. C’est un lourdaud rusé que Dieu semble avoir enrichi pour montrer le cas qu’il fait de la richesse. — Ce n’est pas là une famille où vous puissiez entrer. Vous vous marierez, mon ami ; je n’ai pas l’égoïste prétention d’absorber à mon profit votre existence tout entière ; mais reposez-vous sur moi du soin de votre bonheur. Je veux que votre mariage ne soit pas un marché, je veux que votre femme soit si charmante, qu’il ne vienne à l’esprit de personne de demander si elle est riche ou pauvre ; je veux que l’éclat de sa dot pâlisse devant sa grâce et sa beauté.

Jean.

Mais, chère Hortense, où prendrez-vous cette merveille ?

Hortense.

Je la chercherai, je la trouverai. C’est moi qui lui apprendrai à vous aimer… Cher Thomé ! c’est pour moi que vous avez refusé cette fortune… J’ai l’air d’une ingrate ; mais, au fond du cœur, je vous en sais autant de