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Page:Auguste Rodin - Les cathedrales de France, 1914.djvu/293

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et que je l’avais trouvée triste et froide. Mais, depuis, j’ai acquis plus d’intelligence et de tendresse, avec plus d’années.


Le portail, refait au XVIe siècle, est d’une grâce infinie : l’équivalent, en ornementation architecturale, de la poésie de la Pléiade.


Au tympan, il n’y a plus que des ornements, du reste, exquis. Mais il y a eu sans doute, jadis, des figures d’un plus haut intérêt. À la profonde symphonie de la forêt a succédé un gazouillement d’oiseau.

Plus tard, cela se réduira au cartouche ; où se développa toute une histoire on ne verra plus qu’un blason ; il y persistera quelques traces de cette histoire divine.

Plus tard encore, ces traces, ces souvenirs du grand style iront, dans la plupart des villes, embellir les demeures de certains particuliers : élégance sobre, noblesse paisible des façades, des portes.

Cette expression fleurie de l’esprit français, ce bien-être intellectuel qui distingua notre race, est la dernière forme de l’art gothique retouché par le génie de la Renaissance.

… Mais voici des enfants qui entrent à l’église, puis, peu de minutes après, sortent en jouant. Ils sont pareils à ces exquis ornements Renaissance qu’on a ajoutés au portail. Qui sait ? peut-être que ces enfants auront retenu quelque chose de ce catéchisme de pierre. Plus heureux, plus sages que leurs parents… Ceux-ci passent devant l’église sans y entrer, sans la voir…

Une génération ne viendra-t-elle pas, capable de m’entendre, moi qui ne cesse de répéter : La vérité de l’art et le bonheur sont ici !

C’est pour elle que j’écris.