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Mais elle invente un élément essentiel, qui la caractérise, qui signifie sa nouveauté, qui transformera l’aspect extérieur du monument : la tour, le Clocher. Elle en a besoin pour appeler les fidèles aux cérémonies du culte. L’importance matérielle du clocher se développera sans cesse avec la puissance de l’Église. Dès son apparition nous reconnaissons en lui la ligne spécifique de l’architecture chrétienne, la ligne verticale.

Ainsi, toutes les parties du vaste ensemble, tous les organes du grand corps mystique sont déjà définis, constitués, doués de vie. Mais ils sont séparés ; le baptistère et les clochers restent distants du bâtiment principal ; celui-ci, d’autre part, n’a qu’une existence précaire, son toit plat, en bois, l’exposant perpétuellement à l’incendie.

L’esprit de concentration, de solidité, de durée, qui est l’esprit même de l’Église, qui est le sens de l’orthodoxie, va consacrer les siècles qui viennent à l’œuvre nécessaire d’assemblage, de réunion. Cette œuvre accomplie sera l’expression sensible de la cohésion des pensées, des croyances, des espérances chrétiennes, une sorte d’articulation matérielle des dogmes.

Y a-t-il, dès le premier jour, dans cet immense effort, une préoccupation de beauté ? Oui, sans doute, puisqu’il y a un désir d’unité, c’est-à-dire d’harmonie. C’est, d’ailleurs, dans la pensée commune, la certitude, l’évidence, que la maison consacrée au Seigneur doit être de toutes la plus spacieuse et la plus ornée. Mais ici la beauté, et c’est ce qui lui assure un long avenir, se confond avec l’utilité. Rien n’est laissé au caprice. Le programme est d’accommoder les divers éléments de l’édifice à son but unique, le service de Dieu. L’artiste, dans l’accomplissement de ce programme, n’est qu’une main, à laquelle commande le cerveau du prêtre.

Et d’abord ils vont tous deux au plus pressé : ce sont les grosses parties de l’œuvre que d’urgence il s’agit de réduire à l’unité.

Le baptistère est le vestibule de l’église. Nul ne peut participer aux sacrements avant d’avoir reçu le premier de tous, le baptême. Il avait donc paru naturel, dans les commencements, que le local destiné à cette cérémonie préliminaire se trouvât placé à côté de l’église, un peu en avant de la façade. Mais convient-il que le néophyte, avant d’entrer dans la communion des saints, s’expose à perdre les bénéfices du baptême en traversant l’air du siècle ? On rapproche progressivement le baptistère de l’église, puis on l’y réunit par une galerie