Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome I.djvu/39

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Elle parlait allemand. « Comment voulez-vous que Dieu vous entende ? lui dit celle qui la servait, vous l’invoquez dans une langue étrangère ! »

La bienveillance du paysan magyar pour l’hôte, pour l’étranger même, va fort loin. Je me souviens que, me trouvant dans une boutique, à Debreczin, je liai conversation avec une vieille villageoise qui faisait ses emplettes. Me reconnaissant pour un étranger, elle me demanda si mon pays était éloigné, si les miens pleuraient mon absence, si j’avais souvent regretté la patrie ; puis, me voyant en deuil, elle m’adressa des paroles de consolation et ne me quitta pas sans me bénir. J’avoue que je me séparai d’elle avec quelque émotion. Au reste j’ai plus d’une fois admiré l’élévation d’idées et de sentiments manifestée par ces hommes que leur seule nature inspirait. Le paysan hongrois est sobre de paroles, il ne devient jamais familier ; mais il est franc et loyal, et, s’il reconnaît en vous un ami, il s’ouvrira avec sincérité. Vous serez frappé alors de certaines sentences qui lui échapperont, de certaines pensées qu’il formulera sans se douter qu’il captive fortement votre intérêt, et il vous sera facile en retour de faire naître en lui de vives émotions. C’est qu’il y a dans le cœur de cette nation de nobles cordes qui vibrent au premier contact d’un sentiment élevé ou d’une idée généreuse.

La dignité du paysan magyar est celle des Orientaux. Il est grave comme le Turc. Il faut qu’il danse au son de