Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/349

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fait ces promesses, et vous qui avez appelé ces désastres. Comment croire à votre serment, où retrouver vos promesses ? Que signifie tout cela, mes frères ? La promesse de Dieu serait-elle fausse, et son serment un parjure ? Pourquoi ces promesses pompeuses et ces malheurs qui les suivent ? Et moi, je soutiens que ces malheurs confirment sa prouesse. Mais qui suis-je pour parler ainsi ? Voyons si la vérité parle de la sorte, et alors je n’aurai pas vainement parlé. David était l’homme à qui Dieu faisait toutes ces promesses qui devaient avoir leur accomplissement dans le Christ. Or, les hommes attendaient en David l’accomplissement des promesses faites à David. Et de peur que parmi les chrétiens, l’un ne vînt dire : Ceci regarde le Christ l’autre : Non, mais David, et qu’on ne tombât dans l’erreur en voyant ces promesses s’accomplir eu David ; voilà que Dieu a détruit toutes ces promesses en David même, afin qu’en voyant qu’elles ne sont point accomplies en lui, tu cherches en quel autre on les voit s’accomplir. Il en est de même en Esaü et en Jacob, dont le second se prosterna devant l’aîné, bien qu’il fût écrit : « L’aîné sera soumis au plus jeune[1] » ; ne voyant point cette prophétie accomplie dans les deux frères, tu dois jeter les yeux sur deux peuples, en qui s’accomplit la promesse de Dieu, qui ne peut être mensongère. Il dit donc à David : « Je mettrai sur ton trône quelqu’un de tes enfants[2] ». Il lui promit quelque chose d’éternel dans sa race ; et voilà que Salomon vint au monde, et fut doué d’une telle sagesse, que l’on pensait qu’en lui s’accomplissait la promesse de Dieu sur sa postérité ; mais Salomon tomba[3], et nous fit ainsi espérer le Christ car le Seigneur, qui ne peut ni se tromper, ni tromper, n’ayant point pris pour objet de ses promesses un homme dont il prévoyait la chute, tu as dû, après cette chute, lever les yeux vers Dieu et solliciter l’accomplissement des promesses. Votre parole, ô Dieu, est donc mensongère ? Ne tiendrez-vous point à ce que vous avez promis ? Votre serment est-il un parjure ? Mais ici Dieu pourrait vous répondre : J’ai juré, j’ai promis, mais il n’a pas voulu persévérer. Eh quoi donc ! ô vous, Seigneur mon Dieu, ne saviez-vous point qu’il n’aurait point la persévérance ? Vous le saviez assurément. Pourquoi donc me promettre quelque chose d’éternel dans un homme qui ne devait point persévérer ? N’est-ce point vous qui avez dit : « S’ils abandonnent ma loi, s’ils ne marchent point dans ma justice, s’ils méprisent mes préceptes et profanent mon Testament » ; ma promesse n’en sera pas moins immuable, mon serment s’accomplira ? « Je l’ai juré une fois dans ma sainteté », dans ce secret intérieur, dans cette source où les Prophètes ont puisé ce qu’il nous ont prêché extérieurement : « Je l’ai juré une fois, et je ne mentirai point à David ». Montrez donc, Seigneur, ce que vous avez juré, accomplissez votre serment : de tout cela David est privé, afin que l’on n’en espère point l’accomplissement dans ce David. Attendez donc l’effet de mes promesses.
7. David au reste le fait lui-même. Vois ce qu’il a dit : « Néanmoins, Seigneur, vous avez rejeté, anéanti tout cela ». Où donc est votre promesse ? « Vous avez éloigné votre Christ ». Bien qu’il énumère des désastres, il nous console néanmoins par cette dernière parole. Ce que vous avez promis, ô mon Dieu, subsiste donc toujours, car vous n’avez point dérobé votre Christ pour toujours, vous l’avez seulement éloigné. Voyez donc ce qui est arrivé à ce David, en qui leur ignorance leur faisait croire que Dieu accomplirait ses promesses, afin que ces mêmes promesses fussent accomplies dans un autre en qui l’on espère avec plus de certitude : « Vous avez éloigné votre Christ, vous avez rompu l’alliance avec votre serviteur ». Où est en effet l’alliance antique avec les Juifs ? Où est cette terre promise qu’ils ont habitée pour commettre tant de fautes, que Dieu a détruite pour les en chasser ? Cherche le royaume des Juifs, dl n’est plus ; l’autel des Juifs, il n’est plus ; le sacrifice des Juifs, il n’est plus ; le sacerdoce des Juifs, il n’est plus : « Vous avez rompu l’alliance avec votre serviteur ; son sanctuaire est profané dans la poussière ». Vous avez montré la poussière dans ce qu’il avait de plus saint. « Vous avez détruit toutes ces murailles », dont vous l’aviez environné. Comment l’eût-on pillé, si ses murailles n’eussent été détruites ? « Ses remparts sont un objet de terreur ». Qu’est-ce à dire un objet de crainte ? ils font dire au pécheur : « Si Dieu n’a point épargné les branches naturelles, il ne te pardonnera point non plus[4]. Tous ceux qui passaient par

  1. Gen. 25,23
  2. Ps. 131,11
  3. 1 R. 11,1
  4. Rom. 11,21