Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/430

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Vous m’appelez à une muraille blanchie, et moi j’adore mon Dieu dans son temple saint.

11. « Que toute la terre soit ébranlée devant sa face : dites aux nations : Le Seigneur a régné par le bois, car il a raffermi la terre qui ne sera point ébranlée[1] ». Combien de preuves que la maison de Dieu s’élève ? Les nuées du ciel nous crient de toutes parts que la maison de Dieu se construit dans l’univers entier : et les grenouilles des marais osent nous dire : Nous sommes les seuls chrétiens. Quels témoignages avancer ? Ceux du psaume ; ceux que tu chantes sans les entendre : ouvre les oreilles, tu chantes ces témoignages, tu les chantes avec moi, mais en désaccord avec moi : ta langue rend le même son que la mienne, et ton cœur est en désaccord avec mon cœur. N’as-tu pas chanté ces paroles ? Vois que c’est bien le témoignage de l’univers entier : « Que toute la terre s’ébranle devant sa face ». Et tu soutiens qu’elle n’est pas ébranlée ? « Et aux nations : Le Seigneur a régné par le bois ». Prendront-ils ces paroles à leur avantage, et diront-ils qu’ils règnent par le bois, parce qu’ils règnent par les bâtons des circoncellions ? Règne par la croix du Christ, si tu veux régner par le bois. Ce bois dont tu es armé, te fait bois toi-même, tandis que le bois du Christ te fait traverser la mer. Écoute le psaume qui nous dit : « Il a raffermi la terre, qui ne sera point ébranlée » : et tu dis qu’après avoir été affermie, non seulement elle est ébranlée, mais même diminuée. Est-ce toi qui dis vrai, ou le Psalmiste qui ment ? Les faux prophètes qui nous disent : « Le Christ est ici, ou il est là[2] », ont dit vrai, et le vrai Prophète est menteur ? Quelle que soit la clarté de ces paroles, vous ne laissez pas d’entendre ce murmure au coin des rues : Tel ou tel a livré les livres saints. Que dis-tu ? Est-ce ta voix ou celle de Dieu qu’il faut entendre ? « Il a affermi la terre qui ne sera point ébranlée ». Et moi je te montre l’univers entier devenu le temple de Dieu ; apporte une hostie, entre dans le parvis du Seigneur. Mais parce que tu n’as pas d’hostie, tu ne veux pas entrer. Qu’est-ce à dire ? Si Dieu te commandait de lui offrir un taureau, un bouc, un bélier, tu trouverais ces victimes : il te demande un cœur humble, et tu ne veux pas entrer. Tu ne saurais en effet le trouver en toi, puisque tu es rempli d’orgueil. « Dieu a raffermi la terre qui ne sera point ébranlée. Il jugera les peuples dans l’équité ». Alors ceux qui n’aiment point l’équité en cette vie, pleureront leur misère.

12. « Que les cieux se réjouissent et que la terre tressaille[3] ». Qu’ils soient dans la joie, ces cieux qui annoncent la gloire de Dieu ; qu’ils soient dans la joie, ces cieux qu’a faits le Seigneur ; qu’elle tressaille, cette terre qu’arrosent les cieux. Car les cieux sont les prédicateurs, et la terre ceux qui les écoutent. « Que la mer soit ébranlée, et tout ce qu’elle contient ». Qu’est-ce que la mer ? le monde. La mer a été ébranlée, et tout ce qu’elle contient : le monde entier s’est soulevé contre l’Église, quand elle se répandait et se construisait dans tout l’univers. Ce soulèvement, vous l’avez entendu dans l’Évangile : « Ils vous traîneront devant les tribunaux[4] ». La mer s’est donc soulevée ; mais comment vaincre Celui qui a fait les cieux ?

13. « Les campagnes se réjouiront, et tout ce qu’elles renferment ». Les hommes doux, les humbles, les justes, sont les campagnes de Dieu. « Alors tressailliront les bois des forêts[5] ». Ces bois des forêts sont les païens. Pourquoi seront-ils dans la joie ? Parce qu’ils ont été retranchés de l’olivier sauvage pour être entés sur l’olivier franc[6]. « Alors tous les arbres des forêts seront dans la joie », parce qu’on y a coupé de grands arbres, des cèdres, des cyprès, d’autres bois incorruptibles pour les faire entrer dans l’édifice de l’Église[7] ; bois des forêts avant d’entrer dans l’édifice, bois des forêts, mais avant de porter l’olive.

14. « Alors tressailliront les bois des forêts devant la face du Seigneur, parce qu’il vient, parce qu’il vient pour juger la terre[8] »  . Il est venu une fois, et il doit revenir une seconde fois. Il est venu dans son Église, porté sur les nuées. Quelles sont les nuées qui l’ont porté ? Les Apôtres qui l’ont annoncé, comme vous l’entendiez par la lecture de saint Paul : « Nous sommes les ambassadeurs du Christ », nous dit-il, « vous conjurant en son nom de nous réconcilier à Dieu[9] ». Telles sont les nuées sur lesquelles est venu le Christ, mais il doit venir

  1. Psa. 95,10
  2. Mat. 24,23
  3. Psa. 95,11
  4. Mrc. 13,9
  5. Psa. 95,12
  6. Rom. 11,17
  7. 1Ro. 5,6
  8. Psa. 95,13
  9. 2Co. 5,20