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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/650

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tellement un attribut de Dieu, que le Fils de Dieu lui-même s’entendant appeler : « Bon maître », par un homme qui ne voyait en lui que la chair, sans comprendre la plénitude de la divinité qui était en lui, et le croyait simplement un homme, lui répondit : « Pourquoi m’appeler bon ? Nul n’est bon que Dieu seul[1] ». Qu’est-ce dire autre chose, sinon, si tu veux m’appeler bon, comprends que je suis Dieu ? Toutefois, le Psalmiste s’adresse à un peuple qui, pour nous figurer l’avenir, fut délivré de ton labeur, de la captivité, de l’exil, et de tout mélange avec les impies, faveur qu’il obtint par la grâce de Dieu, qui non seulement ne lui rendait pas le mal pour le mal, mais lui rendait au contraire le bien pour le mal ; dès lors c’est avec raison que le Prophète ajoute : « Parce que sa miséricorde est éternelle ».
3. « Que la maison d’Israël publie qu’il est bon, que sa miséricorde est éternelle. Que la maison d’Aaron publie qu’il est bon, parce que sa miséricorde est éternelle. Que tous ceux qui craignent le Seigneur publient que sa miséricorde est éternelle[2] ». Vous reconnaissez, je crois, mes frères, quelle est la maison d’Israël, la maison d’Aaron ; l’une et l’autre comprennent ceux qui craignent le Seigneur. Ce sont là ces petits et ces grands que, dans un autre psaume, nous vous avons fait remarquer ; or, réjouissons-nous que la grâce de celui qui est bon, et dont la miséricorde est éternelle, nous a mis de leur nombre ; car ils ont été exaucés, ceux qui ont dit : « Que le Seigneur vous multiplie, vous et vos enfants[3] » ; afin d’ajouter les Gentils à ceux des Israélites qui ont cru en Jésus-Christ, et d’où sont venus les Apôtres nos pères ; ce qui met le comble à l’éminence des parfaits et à l’obéissance des petits. Et dès lors formant l’unité dans le Christ, devenus un seul troupeau sous un seul pasteur, et le corps de cette tête adorable, disons tous, comme un seul homme : « Dans ma tribulation j’ai invoqué le Seigneur, et il m’a exaucé en dilatant mon cœur[4] ». Cette affliction qui nous met à l’étroit prend une fin, et cette béatitude où nous passons n’a point de bornes. « Qui donc oserait accuser les élus de Dieu[5] ? »
4. « Le Seigneur est avec moi, je ne craindrai point les efforts d’un homme[6] ». Mais l’Église n’a-t-elle d’ennemis que parmi les hommes ? L’homme adonné à la chair et au sang est-il donc autre chose que chair et sang ? Mais, dit l’Apôtre, « ce n’est point contre la chair et le sang qu’il nous faut combattre ; mais contre les puissances et les princes de ce monde, et de ce siècle ténébreux[7] » : c’est-à-dire, ceux qui dirigent les méchants, les hommes épris du monde, et dès lors des ténèbres ; car nous aussi nous fûmes ténèbres, et maintenant nous sommes lumière en notre Seigneur[8]. « Contre les esprits de malice répandus dans les airs[9] », dit saint Paul, c’est-à-dire contre le diable et ses anges ; et c’est ce même diable qu’il appelle ailleurs le prince des puissances de l’air[10]. Écoute maintenant ce qui suit ; « Le Seigneur est mon soutien, et je mépriserai mes ennemis[11] ». De quelque nature qu’il me vienne des ennemis, soit des hommes méchants, soit des esprits de malice, appuyé sur le Seigneur, je les mépriserai, et nous confessons notre Dieu en chantant l’ Alléluia en son honneur.
5. Mais quand j’aurai bravé mes ennemis de la sorte, que nul homme ne fasse valoir auprès de moi sa bonté, son amitié, pour me forcer à mettre en lui mon espérance. « Car il est meilleur pour moi de me confier en Dieu qu’en aucun homme[12] ». Que nul de ces esprits que l’on peut appeler de bons anges, ne s’impose à moi comme si je lui devais ma confiance ; car nul n’est bon, si ce n’est Dieu. Et quand un homme ou un ange paraissent nous venir en aide, quand ils le font par une vraie charité, c’est Dieu qui le fait par eux, lui qui leur a donné une bonté proportionnée. « Donc il est meilleur pour nous d’espérer en Dieu, que d’espérer dans les princes[13] ». Les anges en effet sont appelés du nom de princes, ainsi que nous lisons en Daniel : « Michel votre prince[14] ».
6. « Toutes les nations m’ont environné, et au nom du Seigneur j’en ai tiré vengeance ; elles m’ont environné de toutes parts, et au nom du Seigneur j’en ai tiré vengeance[15] ». Quand le Prophète nous dit que toutes les nations l’ont environné, et qu’il en a tiré vengeance, il nous montre les travaux et les victoires de l’Église. Mais comme si on lui demandait comment elle a pu surmonter de si

  1. Mc. 10,17-18
  2. Ps. 117,2-4
  3. Id. 113,12-14
  4. Id. 117,5
  5. Rom. 8,33
  6. Ps. 117,6
  7. Eph. 6,12
  8. Id. 5,8
  9. Id. 6,12
  10. Id. 2,2
  11. Ps. 117,7
  12. Id. 8
  13. Id. 9
  14. Dan. 12,1
  15. Ps. 117,10