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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/82

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est seule catholique ; marchez dans la voie, marchez en chantant des hymnes. Voilà ce que font les voyageurs pour alléger leur fatigue. O vous donc, chantez dans cette voie, je vous en supplie par la voie elle-même, chantez dans cette soie : chantez un cantique nouveau ; que nul ne chante rien du vieil homme ; chantez les hymnes de la patrie, rien de vieux. Nouvelle voie, nouveau voyageur, nouveau cantique. Écoute l’Apôtre qui t’exhorte à chanter un cantique nouveau : « Si donc quelqu’un est à Jésus-Christ, c’est une nouvelle créature : le passé n’est plus, tout est devenu nouveau[1] ». Chantez un cantique nouveau dans la voie que vous connaissez sur la terre. En quelle terre ? « Dans toutes les nations ». Donc le cantique nouveau n’appartient point à telle partie. Chanter dans une partie, c’est chanter le passé : quoi qu’il puisse chanter, c’est le passé qu’il chante, c’est le vieil homme qui chante, il est divisé, il est charnel. Il est certainement charnel, autant qu’il est le vieil homme ; autant il est l’homme nouveau, autant il est l’homme spirituel. Voilà ce que dit l’Apôtre : « Je n’ai pu vous parler comme à des hommes spirituels, mais seulement comme à des hommes charnels ». Comment leur prouvera-t-il qu’ils sont charnels ? « Quand l’un dit : Je suis à Paul ; et l’autre : Je suis à Apollo, n’êtes-vous pas », dit saint Paul, « des hommes charnels[2] ? » Chantez donc en esprit un cantique nouveau dans la voie sûre. Ainsi chante le voyageur, souvent même il chante pendant la nuit. Autour de nous se font entendre des ennemis redoutables, ou plutôt sans se faire entendre ils gardent le silence, d’autant plus redoutable que leur silence est plus profond ; et toutefois on chante bien qu’on redoute les voleurs. Combien est-il plus sûr pour toi de chanter dans le Christ ? Il n’y a dans cette voie aucun voleur, à moins que tu n’ailles te jeter chez les voleurs, en quittant cette voie. Chante, je le répète, chante en sûreté un cantique nouveau dans le chemin que tu connais « sur la terre », c’est-à-dire « dans toutes les nations ». Remarque bien qu’il ne chante pas avec toi le cantique nouveau, celui qui ne veut être que dans une partie du monde. « Chantez », dit le Prophète, « un cantique nouveau » ; et il continue : « Que toute la terre chante le Seigneur[3]. Que les peuples vous bénissent, ô mon Dieu ». Ils ont trouvé votre voie, qu’ils vous confessent. Chanter c’est confesser, confesser tes fautes et la vertu de Dieu. Confesse ton iniquité, confesse la grâce de Dieu : accuse-toi, glorifie le Seigneur ; réprime-toi, et bénis-le, afin que quand il viendra il trouve que tu t’es châtié, et se donne à toi pour Sauveur. Pourquoi craindre de le confesser, vous qui avez trouvé cette voie dans tous les peuples ? Pourquoi craindre de le confesser, et dans cette confession de chanter un cantique nouveau avec toute la terre, dans toute la terre, et dans la paix catholique ? Craindrais-tu d’avouer tes fautes à Dieu, de peur qu’il ne te condamne à cause de tes aveux ? Si tu te caches par défaut d’aveu, tu te confesseras pour être condamné. Tu crains de faire des aveux, toi que le défaut d’aveu ne saurait cacher ; tu seras condamné par ton silence, tandis que l’aveu pourrait te sauver. « Que les peuples vous confessent, ô mon Dieu, que tous les peuples chantent vos louanges[4] ».
7. Et parce que cet aveu ne nous conduit pas au supplice, le Prophète continue : « Que les nations tressaillent et soient dans l’allégresse ! » Si l’aveu devant un homme arrache des pleurs aux fripons, que l’aveu devant Dieu donne la joie aux fidèles. Au tribunal d’un homme, on force un voleur à l’aveu par la crainte et la torture : souvent même la crainte étouffe cet aveu qu’arracherait la douleur : et tel qui gémit dans les tourments, mais qui craint la mort après son aveu, supporte la torture autant qu’il est possible ; mais s’il est vaincu par la douleur, son aveu fait son arrêt de mort. Pour lui donc il n’y a nulle joie, nulle allégresse ; avant l’aveu, il est déchiré par les ongles de fer, après l’aveu, il est condamné, livré au bourreau ; partout il est malheureux. Mais « que les nations tressaillent et soient dans l’allégresse ! » Quelle en sera la cause ? la confession. Pourquoi ? Parce que c’est au Dieu de bonté qu’elles font des aveux ; s’il exige la confession, c’est pour délivrer les humbles ; s’il damne celui qui refuse l’aveu, c’est pour châtier son orgueil. Sois donc dans la tristesse avant l’aveu, et après l’aveu dans la joie, car tu seras guéri. Le pus s’était amassé dans ta conscience, l’abcès était formé, la douleur ne te laissait aucun repos : le médecin

  1. 2 Cor. 5,17
  2. 1 Cor. 3,1-4
  3. Ps. 95,1
  4. Ps. 66,5