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ACCORD DES ÉVANGÉLISTES.

LIVRE PREMIER.

Le Saint docteur dit quelques mots de l’autorité, du nombre, de la manière, d’écrire des Évangélistes et de l’ordre dans lequel ils se présentent : puis avant de parler de leur accord, il répond dans ce livre à ceux qui s’étonnent de l’absence de tout écrit composé par Jésus lui-même, ou le supposent auteur de certains livres de magie ; et qui, pour détruire la doctrine de l’Évangile, reprochent aux disciples de Jésus-Christ d’avoir trahi la vérité, en donnant à leur maître le nom de Dieu, et d’avoir ajouté à son enseignement, en proscrivant le culte des dieux. Il défend contre ces détracteurs audacieux la doctrine des Apôtres et des Prophètes, en montrant que le Dieu d’Israël doit seul être adoré, lui, qui d’abord repoussé des Romains par une exception singulière, a fini par soumettre à son nom l’empire Romain, et comme l’avaient annoncé ses prophètes, a renversé les idoles chez toutes les nations par la prédication de l’Évangile.

CHAPITRE PREMIER. AUTORITÉ DES ÉVANGILES.

1. Parmi tous les livres divins, contenus dans les Saintes Écritures, l’Évangile tient à bon droit le premier rang. Nous y voyons, en effet, l’explication et l’accomplissement de ce que la Loi et les Prophètes ont annoncé et figuré. Il eut pour premiers prédicateurs les Apôtres qui, de leurs propres yeux, virent dans la chair ici-bas notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, et qui ensuite revêtus de la fonction d’Évangélistes s’employèrent à publier dans le monde ce qu’ils se souvenaient de lui avoir entendu dire ou de lui avoir vu faire ; ils annoncèrent aussi les événements divins et mémorables de sa naissance et de ses premières années, dont ils ne furent pas les témoins, n’étant devenus que plus tard ses disciples, mais dont ils purent s’informer près de lui ou de ses parents ou d’autres personnes, et qu’ils purent connaître enfin par les témoignages les plus sûrs et les plus véridiques. Deux d’entre eux, saint Matthieu et saint Jean nous ont même laissé sur lui, chacun dans un livre, ce qu’ils ont cru devoir consigner par écrit.

2. Comme on aurait pu croire qu’il importait à la connaissance et à la prédication de l’Évangile, d’établir une différence entre les Évangélistes, et d’examiner s’ils étaient du nombre des disciples qui, durant les jours de l’apparition du Seigneur dans la chair, l’ont suivi et ont vécu à son service, ou du nombre de ceux qui ont cru sur le rapport des premiers Apôtres après l’avoir recueilli fidèlement : la divine Providence a pourvu par l’Esprit-Saint à ce que quelques-uns des disciples de ces mêmes Apôtres reçussent non-seulement le pouvoir d’annoncer l’Évangile mais encore celui de l’écrire. Nous en comptons deux, saint Marc et saint Luc. Pour les autres hommes qui ont essayé ou ont eu la présomption à écrire sur les actions du Seigneur lui-même ou de ceux qu’il avait réunis autour de lui ; ils n’ont offert à aucune époque les conditions voulues pour que l’Église les considérât comme organes de la vérité et reçut leurs écrits dans le Canon des Livres Saints : non-seulement, du côté du caractère, ils ne donnaient pas les garanties qu’il fallait pour qu’on dût croire à leurs récits, mais de plus les récits eux-mêmes contenaient plusieurs choses opposées à la règle catholique et apostolique de la foi et condamnées par la saine doctrine.

CHAPITRE II. ORDRE ET MANIÈRE D’ÉCRIRE DES ÉVANGÉLISTES.

3. Ces quatre Évangélistes, bien connus dans l’univers entier, dont le nombre mystérieux, égal aux quatre parties du monde, indique peut-être en quelque façon, que l’Église est répandue par toute la terre, ont écrit dans cet ordre, suivant le témoignage de la Tradition : d’abord saint Matthieu, puis saint Marc, ensuite saint Luc et enfin saint Jean. Ainsi l’ordre dans lequel ils ont connu et prêché l’Évangile n’est pas celui dans lequel ils l’ont écrit. Car pour la connaissance et la prédication de l’Évangile, les premiers, sans aucun doute, ont été les Apôtres, qui ont suivi le Seigneur durant les jours de son apparition dans la chair, l’ont entendu parler, l’ont vu agir et ont reçu de sa bouche la mission d’évangéliser le monde. Quant aux écrits, par une disposition