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SERMON CXCVI. POUR LE JOUR DE NOEL. XIII. POUR QUI L’INCARNATION ?

ANALYSE. – La génération du Fils de Dieu dans le sein de son Père est ineffable ; sa naissance du sein de sa mère n’est-elle pas merveilleuse aussi ? Pour qui est-il né ? Pour tous les genres de vie qui sont dans l’Église, pour les vierges, les époux et les veufs. C’est donc pour nous et pour nous tous qu’il s’est tant abaissé et qu’il a tant souffert ! Abus censuré à propos des à propos des calendes de janvier.

1. Voici pour nous la fête de la naissance de Jésus-Christ Notre-Seigneur ; ce jour natal est celui où est né le Jour même, et s’il l’a choisi, c’est par ce qu’à dater d’aujourd’hui le jour commence à grandir. Notre-Seigneur Jésus-Christ a deux naissances : l’une est divine, l’autre humaine, et toutes deux admirables ; dans l’une il n’a point de femme pour Mère, et dans l’autre point d’homme pour Père. Aussi peut-on appliquer à ces deux naissances le cri du saint Prophète haïe : « Qui racontera sa génération[1] ? » Eh ! qui pourrait expliquer convenablement comment un Dieu engendre, comment enfante une Vierge ? La génération divine est en dehors de tout jour, l’enfantement virginal est à un jour déterminé ; ruais ces actes tous deux merveilleux surpassent tous deux les conceptions de l’homme. Écoutez ; voici la première génération : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu[2] ». Le Verbe de qui ? Du Père. Quel est ce Verbe ? Le Fils. Le Père n’a jamais été sans son Fils ; et le Père néanmoins a engendré son Fils. Il l’a engendré ; et pourtant le Fils n’a pas commencé. Comment aurait-il commencé, puisque jamais il n’y a eu de commencement à sa génération ? Toutefois, je le répète, il est réellement son Fils et engendré réellement. Comment, dira-t-on, a-t-il été engendré, s’il n’a pas eu de commencement ? S’il est engendré, il a sûrement commencé ; s’il n’avait pas commencé, pourrait-il être engendré ? – Comment ? Je l’ignore. Est-ce à un homme que tu oses demander comment un Dieu a été engendré ? Ta question m’embarrasse ; néanmoins j’en appellerai au Prophète : « Qui racontera, dit-il, sa génération ? » Viens considérer avec moi cette génération humaine, cette génération où il s’est anéanti en prenant une nature d’esclave : pourrons-nous au moins la comprendre ? nous sera-t-il possible d’en dire au moins quelque chose ? Eh ! qui serait capable de comprendre ceci : « Il avait la nature de Dieu, et il n’a pas cru usurper en se faisant égal à Dieu ? » Oui, qui peut comprendre cela ? Qui peut s’en faire une juste idée ? Quelle intelligence oserait sonder cet abîme ? Quelle langue aurait la hardiesse d’en parler ? Quel esprit assez fort pour concevoir ce mystère ? Mais laissons-le pour le moment ; il est trop au-dessus de nos forces. Afin de s’abaisser jusqu’à nous, « il s’est anéanti en prenant une nature d’esclave, en se faisant semblable aux hommes[3] ». Où l’a-t-il prise ? Dans le sein de la Vierge Marie. Parlons donc de cet événement. Mais pourrons-nous ? Un ange l’annonce ; la Vierge l’écoute, y croit et conçoit. Elle a la foi dans le cœur, et le Christ est dans son sein. Vierge, elle conçoit : qui ne serait étonné ? Vierge, elle enfante, étonnez-vous davantage ; après avoir enfanté elle demeure Vierge, qui raconterait cette génération ?

2. Voici qui vous fera plaisir, mes bien-aimés. Il y a dans l’Église trois genres de vie pour les membres du Christ : la vie conjugale, la vie de veufs et la vie des vierges. Or, comme ces vies devaient être, dans toute leur pureté, les vies des membres saints du Christ, toutes ont été appelées à lui rendre témoignage. La

  1. Isa. 53, 8.
  2. Jn. 1, 1.
  3. Phi. 2, 6, 7.