Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VII.djvu/48

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en montrant enfin avant sa mort et avec la certitude de Celui pour qui rien n’est caché, soit dans la paix dont jouit le pauvre, soit dans les flammes où est plongé le riche, quelle vie attend les humains au-delà de cette vie[1] ? Mais ils ne croient pas ces vérités, eux qui répètent. Qui est revenu d’entre les morts ? Ils veulent persuader qu’ils croiraient, si quelqu’un de leurs proches recouvrait la vie. Mais maudit quiconque met son espoir dans un homme[2] ! C’est même pour détourner de nous cette malédiction qu’un Dieu fait homme a voulu mourir, puis ressusciter et montrer ainsi dans une chair humaine, ce qui attend l’homme, pourvu toutefois que l’homme ne s’appuie pas en lui, mais sur Dieu. D’ailleurs l’Église fidèle est répandue par tout l’univers, elle est sous leurs yeux. Qu’ils lisent et ils reconnaîtront que bien des siècles avant son établissement Dieu en avait fait la promesse à un homme, à un homme qui espéra, contre toute espérance, qu’il deviendrait le père d’un peuple innombrable[3]. Ainsi nous voyons actuellement accomplie la promesse faite à un seul croyant, à Abraham, et nous n’espérerions pas avec certitude ce qui a été promis à tous les croyants, à l’univers entier ? Qu’ils s’en aillent donc en répétant : « Mangeons et buvons, car demain nous mourrons ». Ils mourront demain, disent-ils ; la vérité est qu’ils sont morts en parlant ainsi. Pour vous, mes frères, ô fils de la résurrection, concitoyens des saints anges, héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ ; gardez-vous d’imiter ces malheureux qui mourront demain, en ce sens que demain ils expireront, mais qui dès aujourd’hui sont ensevelis dans le vin. Or pour préserver vos mœurs de la corruption des mauvais propos, comme s’exprime l’Apôtre, « observez une sage sobriété et ne péchez point[4] », suivez la voie étroite mais sûre, qui conduit dans cette immense Jérusalem céleste, notre mère pour l’éternité ; espérez fermement ce que vous ne voyez pas, et attendez avez patience ce que vous ne possédez pas encore, puisque vous vous attachez inséparablement au Christ dont les promesses ne peuvent manquer.


SERMON CLVIII.
CONFIANCE EN DIEU[5].

ANALYSE. – Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? L’important donc est de savoir si Dieu est pour nous. Or l’Apôtre enseigne qu’il est pour ceux qu’il a prédestinés, appelés, justifiés et glorifiés. Voyons ce qu’il y a déjà en nous de ces quatre caractères, afin de nous en faire un point d’appui pour obtenir de Dieu ce qui nous manque encore. – Avant même que nous ayons reçu l’existence, Dieu nous avait prédestinés et il nous a appelés en nous faisant chrétiens. Mais sommes-nous justifiés afin d’être un jour du nombre des glorifiés ? Examinons ce que nous pouvons posséder de justice, car elle n’est pas complète ici-bas, et cherchons à acquérir ce qui nous manque. La justification comprend la foi, l’espérance et la charité. Si déjà nous avons en nous la foi et l’espérance, perfectionnons et développons sans relâche la charité, attendu qu’au ciel nous n’aurons plus ni la foi ni l’espérance, nous n’y conserverons que la charité. – Ainsi donc, Dieu nous a suffisamment témoigné sa bonté pour nous inspirer confiance en lui ; c’est à nous de développer avec sa grâce la charité dans notre vie, pour affermir de plus en plus notre confiance.

1. Nous venons d’entendre le bienheureux Apôtre nous encourager et nous rassurer par ces mots : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » Pour qui est-il ? L’Apôtre venait de le dire de la manière suivante : « Ceux qu’il a prédestinés, il les a appelés ; et ceux qu’il a appelés, il les a justifiés ; et ceux qu’il a justifiés, il les a glorifiés. Que dire après cela ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » Dieu est pour nous, en nous prédestinant ; Dieu est pour nous, en nous appelant ; Dieu est pour nous, en nous justifiant ; Dieu est pour nous, en nous glorifiant.

  1. Luc. 16, 19-31
  2. Jér. 17, 5
  3. Rom. 4, 18
  4. 1Co. 15, 32-34
  5. Rom. 8, 30-31