Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VIII.djvu/189

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parole serait une réponse qui signifierait : Jusqu’à ce que j’arrête une résolution dans mon âme, Seigneur, vous m’oublierez par rapport à ma fin, et vous détournerez de moi vos regards : si un homme en effet n’a formé dans son âme le dessein de pratiquer parfaitement la miséricorde, le Seigneur ne le dirige point vers sa fin, et ne se fait pas connaître à lui pleinement, ou face à face. « La douleur dans mon cœur pendant tout le jour », sous-entendez : Je mettrai cette douleur. « Pendant tout le jour » signifie une douleur sans fin, et le jour se prend ici pour le temps, et quiconque veut être délivré du temps, ressent la douleur en son cœur, et demande à passer dans l’éternité pour être délivré du jour terrestre.
3. « Jusques à quand mon ennemi s’élèvera-t-il contre moi[1] ? » L’ennemi, c’est le démon ou l’habitude charnelle.
4. « Regardez-moi, Seigneur, exaucez-moi, ô mon Dieu[2] ». Regardez-moi, est la conséquence de celte plainte : « Jusques à quand vos regards se détourneront-ils de moi n ; et « Exaucez-moi », de cette autre plainte : « Jusques à quand m’oublierez-vous par rapport « à ma fin ? » Illuminez mes yeux, pour que je ne m’endorme jamais dans la mort[3] ». Ces yeux sont ceux du cœur, que pourrait fermer le plaisir mortel du péché.
5. « Que jamais l’ennemi ne puisse dire : « Je l’ai vaincu[4] ». Craignons le persiflage du démon. « Ceux qui me persécutent seront dans la joie, si je suis ébranlé[5] » Cet ennemi, c’est le diable avec ses anges, qui ne dut point se réjouir d’avoir mis à l’épreuve le saint homme Job, cet homme juste qui ne fut point ébranlé[6], c’est-à-dire qui demeura ferme dans la foi.
6. « Pour moi, j’ai mis mon espoir en votre miséricorde[7] ». Si l’homme, en effet, demeure ferme dans le Seigneur et ne se laisse point ébranler, il ne doit point se l’attribuer, de peur qu’en se félicitant de sa fermeté, il ne soit ébranlé par l’orgueil. « Mon cœur a tressailli dans celui qui est votre salut », c’est-à-dire en Jésus-Christ qui est la sagesse de Dieu. « Je chanterai le Seigneur qui m’a comblé de biens » ; de biens spirituels et qui ne touchent point à cette vie. « Je dirai sur la harpe le nom du Très-Haut[8] », c’est-à-dire, dans ma joie je lui rendrai grâces, et je n’userai de mon corps que selon ses préceptes ; telle est l’harmonie spirituelle de l’âme. Si l’on veut établir ici une différence, « je chanterai le Seigneur », exprimera le concert du cœur, et « je dirai sur la harpe », du concert des bonnes œuvres, que Dieu seul peut connaître. « Le nom du Seigneur », c’est la connaissance qu’il nous donne de lui-même, connaissance qui est avantageuse pour nous et non pour lui.


DISCOURS SUR LE PSAUME 13

LES BLASPHÈMES

Ici toute âme gémit quand retentissent à ses oreilles ces blasphèmes que l’impie vomit contre Dieu. Elle voit avec horreur l’impiété qui prévaut ; elle en appelle à Dieu qui doit faire sortir de Sion le salut d’Israël ou des saints.

POUR LA FIN, PSAUME POUR DAVID (Ps. 13,1)


1. Il est inutile de redire si souvent le sens de cette expression « pour la fin », puisque l’Apôtre nous dit que « le Christ est la fin de la loi, pour justifier ceux qui croiront[9] ». Nous croyons en lui quand nous commençons à prendre la bonne voie ; et nous le verrons au terme de cette voie, dont il est ainsi la fin.
2. « L’insensé a dit dans son cœur : Dieu

  1. Ps. 12,3
  2. Id. 4
  3. Id.
  4. Ps. 12,5
  5. Id.
  6. Job. 1,22
  7. Ps. 12,6
  8. Id.
  9. Rom. 10,4