Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VIII.djvu/207

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donne la sagesse aux petits[1] » ; non pas aux superbes. Tel est encore l’Esprit-Saint.
9. « Les jugements du Seigneur sont droits » ; ils portent « dans les cœurs la joie » et non la crainte. C’est l’œuvre de l’Esprit-Saint. « Le précepte du Seigneur est lumineux, il éclaire les yeux[2] » sans les éblouir ; non les yeux de la chair, mais les yeux du cœur ; non ceux de l’homme extérieur, mais de l’homme spirituel. Tel est encore l’effet de l’Esprit-Saint.
10. « La crainte du Seigneur n’est pas servile, mais chaste » ; elle aime gratuitement ce qu’elle appréhende ; ce n’est point le châtiment de celui qu’elle redoute, mais la séparation de celui qu’elle aime. Telle est la crainte chaste qui ne disparaît pas devant la charité parfaite[3], mais « qui demeure dans le siècle des siècles ». C’est là l’Esprit-Saint, ou plutôt, c’est lui qui la donne, qui la répand dans nos âmes, qui la greffe en nous. « Les jugements du Seigneur sont vrais, et se justifient par eux-mêmes[4] », sans porter aux querelles, mais à nous unir dans la paix ; c’est ce que signifie « en eux-mêmes ». Tel est encore l’effet du Saint-Esprit. Aussi, ceux qui le reçurent à sa première descente, reçurent-ils aussi le don des langues, pour nous montrer par là qu’il ramènerait à l’unité toutes les langues de la terre. L’unité de l’Église parle en toutes les langues, et continue aujourd’hui cette merveille d’un seul homme qui s’exprimait alors dans la langue de tous[5], après avoir reçu l’Esprit-Saint. Aujourd’hui c’est encore un seul homme qui parle à toutes les nations et dans toutes les langues, un seul homme, c’est-à-dire la tête et le corps, un seul homme, qui est le Christ et l’Église, l’homme parfait, l’Époux et l’Épouse. « Ils seront deux dans une même chair[6] », a dit l’Écriture. « Les jugements de Dieu sont véritables, ils se justifient par eux-mêmes », à cause de l’unité.
11. « Ils sont plus désirables que l’or et que les pierres précieuses. Beaucoup[7] ». Ce « beaucoup » signifie beaucoup d’or, ou beaucoup précieuses, ou beaucoup désirables ; mais beaucoup, c’est peu pour l’hérétique. Ils n’aiment pas avec nous id ipsum ou l’unité, et avec nous ils confessent le Christ. Mais ce Christ que tu confesses avec moi, aime-le donc avec moi. Et celui qui ne veut point l’unité, qui refuse, qui regimbe, qui méprise, celui-là ne la croit point préférable à l’or et aux pierres précieuses. Écoutez encore : « Ils sont » ; dit le Prophète, « plus doux que le miel et que le rayon ». Mais ceci condamne celui qui s’égare. Le miel est amer pour une bouche fiévreuse, quelque douceur qu’il ait pour une bouche en santé, parce qu’il est précieux pour l’homme qui se porte bien. « Ils sont donc plus désirables que l’or et que les pierres les plus précieuses, plus doux que le miel et que le rayon de miel ».
12. « Aussi votre serviteur les observe-t-il », et en éprouve-t-il ainsi la douceur, non plus en paroles, mais en pratique. Votre serviteur les garde parce qu’ils sont doux en cette vie et utiles pour l’autre vie. « Il trouve à les garder une ample récompensez ». Mais dominé par son obstination, l’hérétique ne peut voir cette lumière, ni goûter cette douceur.
13. « Qui peut connaître ses péchés ? – Mon Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font[8] ». Celui-là donc, dit le Prophète, est votre serviteur, qui peut goûter une semblable douceur, qui a cette tendresse de charité, cet amour de l’unité. Et moi qui la goûte, poursuit le Prophète, je vous en supplie, qui peut en effet connaître ses fautes ? Que jamais en moi, nulle faiblesse ne se glisse chez l’homme, et que cet homme ne se laisse point séduire. « Purifiez-moi, Seigneur, des fautes qui m’échappent ». Nous l’avons chanté, nous y arrivons dans nos explications. Disons donc avec intelligence : Chantons et comprenons, prions en chantant, afin que notre prière soit exaucée ; disons : « Purifiez-nous, Seigneur, des fautes qui nous échappent ». Qui peut connaître ses péchés ? On ne peut les comprendre qu’en voyant ses ténèbres, et nous ne sommes enfin dans la lumière que quand nous nous repentons de nos fautes. Un homme qui se roule encore dans le péché, ne peut voir ce péché, tant ses yeux sont obscurcis et fermés ; que l’on vous mette, en effet, un bandeau sur les yeux du corps, vous ne voyez plus rien, pas même le bandeau. Adressons-nous donc à Dieu, qui sait voir en nous ce qu’il doit purifier, et pénétrer ce qu’il doit guérir, et disons-lui « Purifiez-moi, Seigneur, de mes fautes cachées, épargnez à votre serviteur les péchés

  1. Ps. 18,8
  2. Id. 7
  3. Jn. 4,18
  4. Ps. 18,10
  5. Act. 2,4
  6. Gen. 2,24
  7. Ps. 18,11
  8. Lc. 18,34