Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VIII.djvu/314

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Fils et l’Esprit-Saint n’ont qu’une même œuvre ! La parole de Dieu est assurément le Fils de Dieu, comme le souffle de sa bouche est l’Esprit-Saint ; or, « c’est la parole de Dieu qui affermit les cieux ». Qu’est-ce, pour eux, qu’être affermis, sinon avoir la solidité, être inébranlables ? « C’est du souffle de sa bouche que leur vient la solidité ». On pourrait aussi bien dire : C’est le souffle de sa bouche qui affermit les cieux, et de son Verbe que leur vient la solidité. Car la solidité ale même sens que l’affermissement. L’œuvre du Fils est donc aussi l’œuvre du Saint-Esprit. Mais agissent-ils séparément du Père ? Qui est-ce qui agit par son Verbe et par l’Esprit-Saint, sinon celui à qui appartiennent le Verbe et le Saint-Esprit ? Donc la Trinité est un seul Dieu. C’est lui qu’adorent tous ceux qui savent ce qu’ils doivent adorer ; c’est lui que rencontre partout celui qui veut se convertir. Ceux qui s’éloignent de lui ne le recherchent point ; mais il les rappelle de leur éloignement, afin de les remplir après leur conversion.
6. Je laisse de côté, mes frères, ces cieux qui nous dominent, qui nous sont inconnus, pendant que nous sommes sur la terre, et que nous ne pouvons connaître que par d’humaines conjectures ; je ne m’occuperai donc point des cieux, pour en expliquer la hiérarchie, le nombre, la différence des uns aux autres, les bienheureux habitants, et cet hymne harmonieux et sans fin qui s’élève de toutes parts à la gloire de Dieu ; c’est là une tâche difficile ; toutefois efforçons-nous d’y arriver un jour. Car là est notre patrie, qu’un long exil nous fait trop oublier. C’est nous en effet qui disons clans un psaume : « Malheur à moi, dont l’exil se prolonge »[1]. Il est donc difficile, sinon impossible, et pour moi de vous parler du ciel, et pour vous de me comprendre. Si quelqu’un m’a devancé dans l’intelligence de ces choses divines, qu’il jouisse de son avance, et qu’il prie pour moi afin que je puisse le suivre. Sans parler donc des cieux, nous avons une ample matière de discours, dans ces autres cieux plus rapprochés de nous, qui sont les saints Apôtres de Dieu, les prédicateurs de la parole de vérité, qui ont fait pleuvoir sur nous une douce rosée, afin que le champ de l’Église produisît cette fertile moisson, qui boit, à la vérité, la même pluie que l’ivraie, mais qui n’est pas destinée au même grenier.[2]
7. Donc après nous avoir dit que « la terre est pleine de la miséricorde du Seigneur », le Prophète, comme si vous demandiez : D’où vient sur la terre cette abondante miséricorde ? met d’abord en avant, les cieux qui ont fait pleuvoir la divine miséricorde sur la terre, et sur toute la terre. Car voyez ce qui est dit ailleurs à propos des cieux : « Les cieux racontent la gloire de Dieu, et le firmament publie l’œuvre de ses mains »[3]. Les cieux et le firmament sont identiques. « Le jour parle au jour, et la nuit donne la science à la nuit ». Jamais d’interruption, jamais de silence. Mais où donc ont-ils prêché, et jusqu’où sont-ils parvenus ? « Il n’est point de discours, point de langage dans lequel on n’entende point cette voix »[4]. Mais, diras-tu, cette prédiction regarde ce qui arriva quand les Apôtres, assemblés en un même lieu, parlèrent la langue de fous. Or, « ayant parlé toutes les langues »[5], ils accomplirent ce qui était prédit : « Il n’est point de discours, point de langage, dans lequel on n’entende point cette voix ». Mais je demande : Cette voix qui parlait toutes les langues, jusqu’où est-elle arrivée, quelle contrée a-t-elle remplie ? Écoute ce qui suit : « Leur voix a éclaté par toute la terre, et leurs paroles ont retenti jusqu’aux confins du monde »[6]. De qui ces paroles, sinon des cieux qui racontent la gloire de Dieu ? Donc si leur voix a éclaté par toute la terre, si leurs paroles ont retenti jusqu’aux confins du monde, que celui qui les a envoyés, nous dise ce qu’ils nous ont annoncé. Il nous le dit nettement, il nous le dit avec fidélité ; car il nous a prédit tout cela, même avant l’accomplissement, celui dont toutes les œuvres sont dans la foi. Car il est ressuscité d’entre les morts, et comme ses disciples le reconnaissaient en le touchant, il leur dit : « Il fallait que le Christ souffrît, qu’il ressuscitât des morts, et que l’on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés »[7]. Depuis où et jusqu’où ? « Par toutes les nations », leur dit-il, « en commençant par Jérusalem ». Or, quel plus grand acte de miséricorde pouvons-nous espérer tous, mes frères, sinon que le Seigneur nous remette nos péchés ? Si donc la rémission des péchés est la plus grande miséricorde pour nous, et

  1. Ps. 119,5
  2. Mt. 12,30
  3. Ps. 18,2
  4. Id. 4
  5. Act. 2,4
  6. Ps. 18,5
  7. Lc. 24,46-47