Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/323

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


CINQUIÈME SÉRIE.

TRAITÉS SUR SAINT JEAN.

TRAITÉS SUR L’ÉVANGILE DE SAINT JEAN.

PREMIER TRAITÉ.

LE VERBE.

Pareil à une montagne qui s’élève jusqu’au ciel, Jean va y puiser la connaissance des mystères supérieurs à l’esprit humain ; puissions-nous, en le suivant, arriver au même but ! Le Verbe est la parole de Dieu, parole intérieure, immatérielle, éternelle ; par qui toutes choses ont été faites ; il est l’archétype, le principe vivifiant de toutes les créatures, et, en particulier, la lumière de l’homme.

SUR CE TEXTE DE JEAN : « AU COMMENCEMENT ÉTAIT LE VERBE ET LE VERRE ÉTAIT EN DIEU », JUSQU’À CES MOTS : « ET LES TÉNÈBRES NE L’ONT POINT COMPRISE. » (Chap. 1,4-5.)


1. Quand, d’une part, je considère ce que nous venons d’entendre de la leçon de l’Apôtre, à savoir que l’homme animal ne perçoit point les choses qui sont de l’esprit de Dieu [1] quand je remarque, d’autre part, que, dans cette multitude formée par votre charité, il s’en trouve nécessairement plusieurs, que conduit encore la sagesse de la chair, et qui sont incapables de s’élever jusqu’à l’intelligence des choses spirituelles, non hésitation est grande, et je ne sais comment, avec la grâce de Dieu, j’expliquerai et développerai, selon mes faibles moyens, ce qui a été lu de l’Évangile : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu ». Cette parole, en effet, l’homme animal ne la comprend pas. Hé quoi ! mes frères ? Est-ce pour nous un motif de garder le silence ? Pourquoi lire, s’il faut se taire ensuite ? À quoi bon écouter ce que personne n’explique ? Et pourquoi expliquer, si l’on n’est pas compris ? Mais comme, d’un autre côté, je ne puis douter qu’il n’y en ait parmi vous quelques-uns, non seulement pour comprendre mes explications, mais même pour les deviner d’avance, je ne frustrerai pas ceux qui ont l’intelligence, par la crainte d’adresser des paroles incompréhensibles, et par conséquent inutiles à ceux auxquels elle manque. La miséricorde divine viendra peut-être, d’ailleurs, donner satisfaction à tous, et accorder à chacun la grâce de comprendre comme il peut, parce que celui-là même qui parle dit aussi ce qu’il peut. Car, qui pourrait dire ce qu’est le Verbe ? Je me hasarderai à le dire, mes frères peut-être Jean lui-même n’a-t-il pas dit ce qu’il est, et s’est-il borné à en parler de son mieux, puisqu’il n’était qu’un homme et qu’il parlait de Dieu ? Il était, à la vérité, inspiré d’en haut ; mais, en définitive, il était homme ; parce qu’il était inspiré, il a parlé ; s’il ne l’avait pas été, il n’aurait rien dit, parce qu’il était inspiré, mais homme, il n’a pas dit tout ce qui est ; mais ce que l’homme peut dire, il l’a dit.
2. Aussi bien, mes très-chers frères, Jean était une de ces montagnes dont il est écrit

  1. 1 Cor. 2, 14