Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/687

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dont vous pourrez vous faire entendre ; que tout chef de famille reconnaisse que son nom même l’oblige à témoigner à ses enfants une affection paternelle. Que pour Jésus-Christ et pour la vie éternelle il avertisse tous les siens, qu’il les instruise, qu’il les encourage et les corrige ; qu’il emploie la douceur, qu’il mette en œuvre la sévérité. Et ainsi, dans sa maison, il remplira pour ainsi dire une fonction ecclésiastique et épiscopale, puisqu’il servira Jésus-Christ, afin d’être avec lui pendant l’éternité. Beaucoup d’entre vous ont servi Jésus-Christ jusqu’à souffrir pour lui rester fidèles, et ce n’étaient ni des évêques ni des clercs ; c’étaient des jeunes gens, des jeunes filles, des vieillards, des enfants, des hommes, des femmes mariés, des pères et des mères de famille ; pour servir Jésus-Christ, ils ont donné leur vie par le martyre, et le Père les a honorés en leur donnant les couronnes les plus glorieuses.

CINQUANTE-DEUXIÈME TRAITÉ.

DEPUIS LE PASSAGE OÙ IL EST ÉCRIT : « MAINTENANT MON ÂME EST TROUBLÉE » ; ET « QUE DIRAI-JE ? » JUSQU’À CET AUTRE : « JÉSUS DIT CES CHOSES ET IL S’EN ALLA ET SE CACHA D’EUX ». (Chap. 12,27-36.)

PASSION ET GLOIRE.

Le Christ pour nous encourager à le suivre jusqu’à la mort, a bien voulu emprunter à notre humanité sa faiblesse et ses craintes, et nous montrer, dans la défaite du démon et la gloire qui devait l’environner après sa passion, la promesse de la gloire éternelle après sa passion, la promesse de la gloire éternelle qui couronnera nos propres souffrances.
1. Après avoir, par les paroles que nous avons lues hier, engagé ses serviteurs à le suivre, et prédit sa passion en disant : « Si le grain de froment qu’on jette en terre ne meurt point, il reste seul ; mais s’il meurt, il apporte beaucoup de fruit » ; après avoir excité ceux qui voudraient le suivre jusqu’au royaume des cieux à haïr leur âme en ce monde, s’ils voulaient la conserver pour la vie éternelle, Jésus-Christ s’accommode de nouveau dans sa bonté à notre faiblesse, et il nous dit ces paroles par lesquelles a commencé notre lecture d’aujourd’hui : « Maintenant mon âme est troublée ». Pourquoi, Seigneur, votre âme est-elle troublée ? Tout à l’heure vous avez dit : « Celui qui hait son âme en ce monde, la garde pour la vie éternelle ». Est-ce que vous aimez votre âme en ce monde, pour qu’elle se trouble quand approche l’heure où elle doit sortir de ce monde ? Qui oserait parler ainsi de l’âme du Seigneur ? Il était notre chef, il nous a transportés en lui, il nous a mis dans son cœur, il a pris les sentiments de ses membres. C’est pourquoi rien n’a pu le troubler ; mais, comme il a été dit de lui pour le moment où il ressuscita Lazare, « il se troubla lui-même [1] ». En effet, Jésus-Christ homme, seul médiateur entre Dieu et les hommes, comme il nous portait à ce qu’il y a de plus élevé, devait souffrir avec nous ce qu’il y a de plus humiliant, de la même manière qu’il a voulu que nous fussions élevés par lui à ce qu’il y a de plus sublime.
2. Je l’entends nous dire lui-même « L’heure est venue où il faut que le Fils de l’homme soit glorifié ; si le grain meurt, il produit beaucoup de fruit ». Je l’entends encore ajouter : « Celui qui hait son âme en ce monde, la garde pour la vie éternelle ». Non-seulement il m’est permis d’admirer, il m’est aussi ordonné d’imiter. Il ajoute ensuite : « Si quelqu’un me sert, qu’il me suive, et où je suis, là aussi sera mon serviteur ». Je me sens alors enflammé du désir de mépriser

  1. Jn. 11, 33