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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/342

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nous qui, dans la prospérité a bâti sagement et solidement, se montrera, dans l’adversité, non-seulement courageux et fort, mais encore admirable et digne d’éloges ; car « après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de la vie que Dieu a promise à ceux qui l’aiment[1]». Quant à ceux qui bâtissent sur le sable, ce sont ou bien ceux dont la foi est douteuse et hésitante, ou bien les hérétiques, ou bien les faux chrétiens, ou bien ceux qui ne persévèrent pas dans le parti de la continence ou de la chasteté ; peu importe d’ailleurs que ces crimes soient connus de Dieu seul ou des hommes. Ceux qui en son là participent à la mobilité du sable ; aussi, pour peu que la tempête se lève, ils sont renversés de fond en comble ; car ils ne peuvent se tenir debout et « leur âme n’est plus qu’une grande ruine[2] ». Veillons donc, mes bien-aimés, agissons et travaillons, afin que nous triomphions de l’adversité et méritions la récompense éternelle, par Jésus-Christ qui vit et règne avec le Père, dans l’unité du Saint-Esprit, pendant les siècles des siècles. Ainsi soit-il.




QUARANTE-TROISIÈME SERMON.

POUR LA PENTECÔTE.

(PREMIER SERMON.)



ANALYSE. — 1. Les joies de cette fête. — 2. La grâce du Saint-Esprit produit dans les disciples une sainte ivresse. — 3. Les Apôtres comparés aux trois enfants dans la fournaise.

1. Heureux jour, mes frères bien-aimés ; jour aimable et ravissant, dans lequel le Seigneur accomplit ses promesses à l’égard de ses disciples. Je vous en conjure, réunissez-vous dans une fervente prière, afin de m’obtenir la grâce de parler dignement de ces profonds mystères, et pardonnez-moi si je reste inférieur à la mission que j’entreprends.

2. La solennité de Pâques est arrivée à son terme sans rien perdre de son éclat, et nous a préparés aux splendeurs de ce jour. Pâques a été le commencement de la grâce, la Pentecôte en est le couronnement. Or, les Apôtres étaient réunis dans le cénacle, attendant la venue du Saint-Esprit, et voici que soudain il se fait un grand bruit dans le ciel, et bientôt les disciples se voient calomniés par les Juifs. En effet, comme ces disciples se répandaient en abondantes paroles, on les crut pris de vin, quoique l’heure même où ils parlaient prouvât qu’ils étaient à jeun. Du reste, ce n’est pas sans un secret dessein de la Providence que cette accusation leur fut lancée ; car Jésus-Christ s’est dit lui-même la vigne véritable « Je suis la vigne », dit-il, « et mon Père est le vigneron[3] ». O vin sobre d’ivresse et produisant l’enivrement de la foi ! O vin cueilli sur une vigne auguste et tiré d’une grappe divine ! Magnifique comparaison comme la grappe est portée par le cep, Jésus-Christ était porté par la croix. Or, les disciples étaient remplis du Saint-Esprit, car le Saint-Esprit, qui avait couvert de son ombre la Vierge Marie, sans porter atteinte à sa pureté, venait de descendre sur les Apôtres en forme de langues de feu, sans brûler leurs cheveux.

3. Le prodige que le Seigneur avait autrefois accompli en faveur des trois enfants dans la fournaise, Jésus-Christ le renouvelle en faveur de ses douze Apôtres. Ces

  1. Isa. 1, 12
  2. Mt. 7, 27
  3. Jn. 15, 16