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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/354

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ou ne le vouliez pas, c’est moi qui dompte sa perfidie et sa ruse, quoiqu’il ait été habitué à s’engraisser aux dépens de mon troupeau. Mais je lui montrerai comment il sera vaincu par les renards.
3. Sur l’ordre du Seigneur, Ananie se présente devant Saul, la brebis devant le loup. Quoique ce loup eût été frappé d’aveuglement, il inspirait encore une si grande terreur à la brebis, que celle-ci invoque aussitôt avec le loup le nom même du pasteur. « Saul, mon frère », dit-il, « le Seigneur m’a envoyé vers vous ». – Quel est ce Seigneur ? « Celui qui vous est apparu ». Où ? « Sur le chemin que vous suiviez pour venir[1] ». Mais ne craignez pas, car je suis venu afin que vous puissiez le voir. O Ananie, vous êtes pour nous la cause d’une bien grande joie, car avec la douceur extérieure de la brebis, vous n’avez pas hésité à vous adresser au loup, qui naguère vous aurait fait fuir à travers les montagnes. Le Seigneur nous a montré par là tout l’amour qu’il prodigue à celui qui le sert, puisqu’il inspire à Ananie de donner au loup le nom de frère. Ainsi donc la brebis se tient devant le loup, et elle tremble de frayeur ; le loup s’abaisse devant la brebis et s’incline par respect. Ils s’étonnent de se rencontrer en face l’un de l’autre. Le loup s’arrête et sent faillir sa méchanceté ; la brebis se tient au-dessus du loup et crie. Bientôt la brebis sait entraîner le loup au fleuve du baptême, et le loup, contrairement à ses propres instincts, demande la lumière à la brebis. Et les œuvres du loup restèrent subitement suspendues, dès que la brebis eut versé sur le loup l’eau sainte du baptême. La nature alors subit une transformation des plus inattendues, à tel point que le monde connut clairement que Jésus-Christ est le maître de toute créature, puisque le loup laissait la brebis lui jeter sur les épaules le joug de la loi, et que le loup, bien loin de dévorer la brebis, devenait son défenseur et son appui. Cependant Ananie donne à Saul, la brebis confère au loup l’immense bienfait du baptême, et non-seulement Saul recouvre la lumière qu’il avait perdue, mais il trouve qu’un autre nom est substitué à celui qu’il portait. Saul descendit dans l’eau du baptême, mais c’est Paul qui en sortit. Le loup accablé sous le poids de ses péchés s’abîma dans les fonts sacrés, mais bientôt devenu agneau, il surnagea comme l’huile sur les eaux, et « lorsqu’Ananie lui eut imposé les mains, on vit comme des écailles s’échapper des yeux de Paul[2] ». Ananie prêta le ministère de ses mains, mais c’est Dieu lui-même qui illumina l’Apôtre. Or, dans le sens allégorique, ces écailles représentent ou bien la saleté des vêtements, ou bien l’enveloppe des poissons. L’imposition des mains dissipa l’aveuglement de Paul qui recouvra également ses forces, lorsque, après le baptême, il reçut de la nourriture ; en effet, dès que ses péchés lui furent remis, il mangea le pain des anges et reçut la mission de prêcher le royaume des cieux.[3]

CINQUANTIÈME SERMON. SUR LA CONVERSION DE SAINT PAUL. (DEUXIÈME SERMON.)

ANALYSE. —1. Puissance de la grâce de Jésus-Christ. —2. Histoire de la conversion de Saul. —3. Conclusion.


1. La sainte Écriture est pour nous une source continuelle d’enseignements et de salutaires conseils ; que le chrétien sache lui donner son assentiment et la recevoir avec

  1. Act. 9, 17
  2. Act. 9, 17
  3. Act. 9, 18