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et ce qui prouve que le Fils est égal au Père ; de là ces paroles de l’Apôtre : « Ce n’est point par une usurpation de sa part qu’il s’est dit égal au Père ».

3. Nous lisons : « Mon Père est plus grand que moi, mais il s’est anéanti lui-même[1] ». Voyez, pesez ces paroles : « Il a pris la forme d’esclave ». Quand il s’agit de la forme d’esclave, on se sert du mot : « il prit » ; mais quand il s’agit de la forme de Dieu, au lieu de dire : il prit, le texte porte : « Quoiqu’il fût dans la forme de Dieu, il prit la forme d’esclave, se rendant semblable aux hommes, portant l’extérieur de l’homme ; il s’est humilié, et s’est fait obéissant jusqu’à la mort et à la mort de la croix. Voilà pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom[2] ». En tant qu’il était homme, il a été exalté. Son exaltation fut la conséquence de son humiliation, et en tant qu’il est mort, il est ressuscité. « Il lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom ». Jésus-Christ vint sur la terre, mais sans quitter le ciel ; il ressuscita et monta au ciel, et cependant il n’avait pas quitté le ciel. Vous le regardez comme un homme, ce qu’à Dieu ne plaise. Voici l’homme : « Parmi les enfants des femmes, il n’en fut pas de plus grand ». Écoutez cet homme parlant de sa propre personne : « Je ne suis pas digne de délier les cordons de sa chaussure ». Ne confondez pas ces deux personnages : l’un est Homme-Dieu, l’autre est un homme juste envoyé par Dieu ; l’Homme-Dieu, c’est Jésus-Christ ; l’homme juste, c’est saint Jean ; le premier est la Vérité même, le second n’est que le héraut de la vérité.

CINQUANTE-HUITIÈME SERMON.

SUR LE MARTYRE DES APÔTRES SAINT PIERRE ET SAINT PAUL.

ANALYSE. — 1. Contraste entre la vocation de saint Pierre et celle de saint Paul. — 2. Interprétation mystique des circonstances de leur martyre.

1. Avec la grâce de Dieu, nous célébrons aujourd’hui le martyre de saint Pierre et de saint Paul ; le monde entier solennise aujourd’hui leur mémoire, les unissant dans les mêmes cantiques, comme ils ont été unis par une même foi et couronnés par un même triomphe. C’est la fête de Paul ; et, tous le proclament, c’est aussi la fête de Pierre. Comment garder le silence sur Pierre, quand on se rappelle avec quelle fermeté il a refoulé la rage de Simon le Magicien, lui a enseigné la saine doctrine et a confondu son orgueil ? Par leur trépas glorieux, ces deux Apôtres ont prouvé combien la mort des saints est précieuse devant Dieu. Paul est un vase d’élection, Pierre tient les clefs de la maison du Seigneur ; l’un était pêcheur, l’autre a été persécuteur. Paul a été frappé d’aveuglement, afin de mieux voir ; Pierre a renié, afin de croire. Paul, embrassant la foi de Jésus-Christ après la résurrection de l’Église, s’est montré le disciple d’autant plus glorieux de la vérité, qu’il avait été plus obstiné dans son erreur. Pierre pêcheur n’a pas déposé ses filets, mais les a changés, parce qu’honoré le premier du sacerdoce, il préféra désormais les sources à la mer, et chercha les poissons, non pas pour les détruire, mais pour les purifier. Tous deux furent heureux dans l’administration de la doctrine, mais la mort les confirma dans un bonheur plus grand encore. Sur la terre, la gloire n’est qu’en désir ; au ciel, elle a toute sa réalité. Sur la terre, les tribulations se succèdent, la mort met les saints en possession

  1. Phi. 2, 7
  2. Ib. 7,9