Aller au contenu

Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/418

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Donc, si tu ne te reconnais point, sors « et va sur les traces des troupeaux, et fais « paître tes boucs[1] ». « Des boucs, et les tiens ». Vous savez que les brebis sont à la droite, et les boucs à la gauche. « Fais donc paître tes Boucs ». Pourquoi « tes boucs ? » Parce que tu es sortie, voilà que tu fais « paître tes boucs », comme le fait Donat. Mais si tu ne sors point, tu feras paître « mes brebis[2] », comme le fait Pierre.

TREIZIÈME SERMON. POUR LA FÊTE DE SAINT LAURENT, MARTYR.[3]

ANALYSE.—1. Éloge de saint Laurent, et comment on doit célébrer les fêtes des martyrs.—2. L’exemple des martyrs nous excite à vivre saintement et à nous mettre en garde contre le diable.—3. Nous sommes plus que les Juifs enfants d’Abraham.—4. Contre ceux qui profanent par l’intempérance les fêtes des martyrs.—5. Les affligés doivent prendre saint Paul pour modèle. —6. Charité maternelle chez Paul ; et plus encore dans la divine sagesse.—7. La nécessité, mère des bonnes œuvres.—8. Cette vie n’est qu’un combat contre la mort. —9. Les biens de la vie éternelle sont au-dessus de nos forces.—10. Recommandation du suffrage mutuel de la prière.

1. L’ennui de l’auditeur nous ferait supprimer le discours, qu’exige néanmoins l’obéissance du martyr. Nous allons donc, avec le secours du Seigneur, le mesurer de telle sorte qu’il ne soit ni trop long, ni trop court, mais simplement suffisant. C’est aujourd’hui, à Rome, un grand jour de fête, que célèbre une grande affluence de peuple. Unissons-nous à ce peuple : absents de corps, soyons néanmoins par l’esprit avec nos frères, en un même corps, et sous un même chef. La mémoire de ses mérites ne se borne point, pour notre martyr, à la terre où est le sépulcre de son corps. Partout on lui doit un saint respect. La chair n’occupe qu’un seul endroit, mais l’âme victorieuse est avec Celui qui est partout. Or, comme on nous l’apprend, le bienheureux Laurent était un jeune homme à l’âme virile et grave, recommandable surtout par son âge plein de force, par sa couronne qui ne doit point se flétrir. C’était un diacre, par ses fonctions l’inférieur de l’évêque, par sa couronne l’égal de l’Apôtre. Or, l’Église, a établi ces anniversaires des glorieux martyrs, afin d’amener par la foi à les imiter, ceux qui ne les ont point vus souffrir, de les stimuler par ces solennités. Le cœur humain oublierait peut-être ce que ne rappellerait point une fête anniversaire. Sans doute, on ne saurait établir des solennités pour tous les martyrs, car il n’en manquerait pas pour chaque jour, puisque dans le cours de l’année on ne trouverait pas un jour où quelque martyr n’ait été couronné sur la terre. Mais que les plus belles solennités soient continuelles, et bientôt elles nous fatigueront ; tandis que des intervalles ravivent notre amour. Pour – nous, écoutons ce qui est prescrit, soyons attentifs aux promesses qui sont faites. À chaque solennité d’un martyr, préparons notre cœur à le fêter, de manière à n’être jamais sans l’imiter.

2. C’était un homme, et nous sommes des hommes. Celui qui l’a créé nous a créés aussi ; et nous sommes rachetés au même prix qu’il a été racheté. Nul homme chrétien dès lors ne saurait dire : Pourquoi moi ? Encore moins, doit-il dire : Pour moi non. Mais bien : Pourquoi pas moi ? Vous avez entendu le bienheureux Cyprien, modèle et chantre

  1. Can. 1, 7
  2. Jn. 21, 17
  3. Au manuscrit, fol. 31, page 2, on lit : « Sermon de saint Augustin, évêque, pour la fête de saint Laurent ».- Le commencement semble indiquer un trouble causé par ceux qui profanaient les fêtes des martyrs par des danses déplacées. Il y revient au n° 4.