Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/351

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parce qu’il l’a recouvré sauf. Et s’étant courroucé, il ne voulait pas entrer. Le père donc étant sorti, commença à le prier ; mais il répondit à son père : Voilà que je vous sers depuis tant d’années, sans jamais transgresser votre commandement, et jamais vous ne m’avez donné un chevreau pour faire un festin avec mes amis. Et votre autre fils, qui a dévoré son bien avec des courtisanes, à peine est-il revenu que vous avez tué pour lui le veau gras. Le père lui dit : Vous, mon fils, vous êtes toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à vous. Mais il fallait faire un festin et se réjouir, parce que votre frère était mort, et il revit ; il était perdu, et il est retrouvé[1].

  1. « Quand on voit dans l’Évangile la brebis perdue préférée par le bon Pasteur à tout le reste du troupeau, quand on y lit cet heureux retour du prodigue retrouvé, et ce transport d’un père attendri qui met en joie toute sa famille, ou est tenté de croire que la pénitence est préférée à l’innocence même, et que le prodigue retourne reçoit plus de grâces que son aîné qui ne s’est jamais échappé de la maison paternelle. Il est l’aîné toutefois, et deux mots que lui dit son père lui font bien entendre qu’il n’a pas perdu ses avantages : Mon fils, vous êtes toujours avec moi. etc. Ainsi les cœurs sont saisis d’une joie soudaine par la grâce inespérée d’un beau jour d’hiver, qui, après un temps pluvieux, vient réjouir tout d’un coup la face du monde ; mais on ne laisse pas de lui préférer la constante sérénité d’une saison plus bénigne ; et s’il nous est permis d’expliquer les sentiments du Sauveur par ces sentiments humains, il s’émeut plus sensiblement sur les pécheurs convertis, qui sont sa nouvelle conquête, mais il réserve une plus douce familiarité aux justes, qui sont ses anciens et perpétuels amis, qui sont toujours avec l’Agneau, et paraissent sans tache devant son trône (Apoc. xiv, 5). » Bossuet.