Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/49

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était, à cette époque si rapprochée de la mort du Sauveur, le principal point de controverse avec les Juifs, et, en conséquence, quelle vérité l’auteur du premier Évangile devait-il se proposer d’établir plus solidement, de mettre surtout en relief ? C’est que Jésus était le Messie promis à leurs pères et annoncé par les Prophètes. Or, c’est là précisément le but de saint Matthieu, tel qu’il se révèle dès les premiers mots de son livre, où Jésus est proclamé fils de David, fils d’Abraham, tel que nous le montrent à chaque page ces nombreuses citations de l’Ancien Testament, accompagnées de la formule : Afin que fût accomplie la parole du Prophète, etc. Pour atteindre ce but, fallait-il une exposition suivie de la vie de Jésus, un ordre historique rigoureux dans le récit des faits ? Nullement ; les grandes lignes de l’histoire une fois respectées pour éviter la confusion, l’auteur pouvait distribuer à son gré, et selon son dessein, les narrations et les discours, rapprocher et grouper ensemble les miracles de même sorte, les enseignements qui se ressemblent par le fond ou par la forme. C’est ce qu’a fait saint Matthieu : ainsi, le sermon sur la montagne (v-vii) ne reproduit pas un seul discours du Sauveur, il en réunit plusieurs et présente un résumé de toute la morale chrétienne ; ainsi, dans les chapitres qui suivent immédiatement, se trouvent rapportés ensemble divers miracles réunis là pour montrer dans Jésus le pouvoir de guérir. Nous l’avons dit ailleurs, les habitudes pratiques de la prédication orale durent influer beaucoup sur la rédaction écrite et sur l’arrangement des faits évangéliques. Cela est vrai surtout de saint Matthieu qui, ayant écrit le premier et pour les fidèles de son pays, a quelque chose de plus libre et de plus spontané.