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GRACIEUSE ET PERCINET

pages somptueux : les unes arrivaient dans des chars tirés par des cygnes, d’autres par des dragons, d’autres sur des nues, d’autres dans des globes de feu. Entre celles-là parut la fée qui avait aidé à Grognon à tourmenter Gracieuse ; quand elle la reconnut, l’on n’a jamais été plus surpris ; elle la conjura d’oublier ce qui s’était passé, et qu’elle chercherait les moyens de réparer les maux qu’elle lui avait fait souffrir. Ce qui est de vrai, c’est qu’elle ne voulut pas demeurer au festin, et que remontant dans son char, attelé de deux terribles serpents, elle vola au palais du roi ; en ce lieu elle chercha Grognon, et lui tordit le cou sans que ses gardes ni ses femmes l’en pussent empêcher.


moralité


C’est toi, triste et funeste envie
Qui causes les maux des humains,
Et qui de la plus belle vie
Trouble les jours les plus sereins.
C’est toi, qui contre Gracieuse
De l’indigne Grognon animas le courroux ;
C’est toi qui conduisis les coups
Qui la rendirent malheureuse.
Hélas ! quel eût été son sort,
Si de son Percinet la constance amoureuse
Ne l’avait tant de fois dérobée à la mort !
Il méritait la récompense
Que reçut enfin son ardeur.
Lorsque l’on aime avec constance,
Tôt ou tard, on se voit dans un parfait bonheur.