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LA
BONNE PETITE
SOURIS.


CONTE.



Il y avait une fois un roi et une reine qui s’aimaient si tendrement, qu’ils faisaient la félicité l’un de l’autre. Leurs cœurs et leurs sentimens se trouvaient toujours d’intelligence ; ils allaient tous les jours à la chasse tuer des lièvres et des cerfs. Ils allaient à la pêche prendre des soles et des carpes ; au bal, danser la bourrée et la pavanne ; à de grands festins, manger du rôt et des dragées ; à la comédie et à l’opéra ; ils riaient, ils chantaient, ils se faisaient mille pièces pour se divertir, enfin c’était le plus heureux de tous les temps. Leurs sujets suivaient l’exemple du roi et de la reine ; ils se divertissaient à l’envi l’un de l’autre. Par toutes ces raisons, l’on appelait ce royaume le pays de Joie.

Il arriva qu’un roi voisin du roi Joyeux, vivait tout différemment. Il était ennemi déclaré des plaisirs ; il ne demandait que plaies et bosses, il avait une mine refrognée, une grande barbe, les yeux creux ; il était maigre et sec, toujours vêtu de noir, des cheveux hérissés gras et crasseux. Pour lui plaire ; il fallait tuer