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LES CONTES

vint dans l’allée sombre ou madame D… l’attendait.

« Ha ! que vous avez perdu, s’écria la comtesse de F… en l’abordant, ce que nous venons de voir est merveilleux. — Ce qui vient de m’arriver, lui répliqua-t-elle, ne l’est pas moins. Sachez donc que jetant les yeux de tous côtés pour distinguer mille objets differens que j’admirais, j’ai vu tout d’un coup une jeune nymphe proche de moi, dont les yeux doux et brillans, l’air enjoué et spirituel, les manières gracieuses et polies, m’ont causé autant de satisfaction que de surprise. La robe légère qui la couvrait, laissait voir la proportion de sa taille ; un nœud de ruban arrêtait à sa ceinture les nattes de ses cheveux ; la régularité de ses traits n’avait rien qui ne fit plaisir. J’allais lui parler, lorsqu’elle m’a interrompue par ces vers :

Quand un auguste prince habite ce séjour,
Quand ce palais superbe et ces jardins tranquilles
Souvent de sa pompeuse cour
Sont les agréables asiles,
De tout ce qui s’offre à vos yeux
Est-il rien qui doive surprendre ;
Et ne devrait-on pas s’attendre
À voir tant de trésors enrichir ces beaux lieux ?
On fait renaître ici les heureux jours de Rhée ;
Les chagrins en craignent l’entrée,
Ils en sont pour jamais bannis.
L’innocence, les jeux, les plaisirs et les ris
Y règnent partout à leur place :
Ces bocages charmans, ces parterres fleuris
Ne craignent point l’effort de la saison de glace.
Voyez que le ciel est serein ;