Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/35

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
29
ET PERCINET.

Le soleil était sur le point de se coucher, Grognon en attendait l’heure avec mille impatiences ; enfin elle la devança, et vint avec ses quatre furies, qui l’accompagnaient partout ; elle mit les trois clefs dans les trois serrures, et disait en ouvrant la porte : « Je gage que cette belle paresseuse n’aura fait œuvre de ses dix doigts ; elle aura mieux aimé dormir pour avoir le teint frais. »

Quand elle fut entrée, Gracieuse lui présenta le peloton de fil, où rien ne manquait. Elle n’eut pas autre chose à dire, sinon qu’elle l’avait sali, qu’elle était une malpropre, et pour cela elle lui donna deux soufflets, dont ses joues blanches et incarnates devinrent bleues et jaunes. L’infortunée Gracieuse souffrit patiemment une insulte qu’elle n’était pas en état de repousser ; on la ramena dans son cachot ; où elle fut bien enfermée.

Grognon, chagrine de n’avoir pas réussi avec l’écheveau de fil, envoya querir la fée, et la chargea de reproches. « Trouvez, lui dit-elle, quelque chose plus malaisée, pour qu’elle n’en puisse venir à bout. La fée s’en alla, et le lendemain elle fit apporter une grande tonne pleine de plumes. Il y en avait de toutes sortes d’oiseaux, de rossignols, de serins, de tarins, de chardonnerets, linotes, fauvettes, perroquets, hiboux, moineaux, colombes, autruches, outardes, paons, alouettes, perdrix : je n’aurais jamais fini si je voulais tout nommer.