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BLANCHE.

fois. Le roi et les deux princes ainés gardaient un morne silence, quoique la beauté et la rareté de cette toile les forçât de temps en temps de dire que tout ce qui était dans l’univers ne lui était pas comparable.

Le roi poussa un profond soupir, et se tournant vers ses enfans : « Rien ne peut, leur dit-il, me donner tant de consolation dans ma vieillesse, que de reconnaitre votre déférence pour moi ; je souhaite donc que vous vous mettiez à une nouvelle épreuve. Allez encore voyager un an, et celui qui au bout de l’année ramènera la plus belle fille, l’épousera et sera couronné roi à son mariage ; c’est aussi-bien une nécessité, que mon successeur se marie. Je jure, je promets que je ne différerai plus à donner la récompense que j’ai promise. »

Toute l’injustice roulait sur notre prince. Le petit chien et la pièce de toile méritaient dix royaumes plutôt qu’un ; mais il était si bien né, qu’il ne voulut point contrarier la volonté de son père, et sans différer il remonta dans sa calèche. Tout son équipage le suivit, et il retourna auprès de sa chère Chatte Blanche. Elle savait le jour et le moment, qu’il devait arriver : tout était jonché de fleurs sur le chemin. Mille cassolettes fumaient de tous côtés, et particulièrement dans le château. Elle était assise sur un tapis de Perse et sous un pavillon de drap d’or, dans une galerie où elle pouvait le voir revenir. Il fut reçu par les mains qui l’avaient toujours servi. Tous les chats grimpèrent sur les