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LA BONNE PETITE SOURIS.

ver, l’on eût pris sa peau pour de la neige ; en temps d’été, c’était des lys.

Quand elle fut parée des diamants et des belles robes, la fée la considéra comme une merveille ; elle lui dit : Qui croyez-vous être, ma chère Joliette, car vous voilà bien brave ? Elle répliqua : En vérité, il me semble que je suis la fille de quelque grand roi. — En seriez-vous bien aise ? dit la fée. — Oui, ma bonne mère, répondit Joliette, en faisant la révérence ; j’en serais fort aise. — Hé bien, dit la fée, soyez donc contente ; je vous en dirai davantage demain.

Elle se rendit en diligence à son beau château, où la reine était occupée à filer de la soie. La petite souris lui cria : Voulez-vous gager, madame la reine, votre quenouille et votre fuseau, que je vous apporte les meilleures nouvelles que vous puissiez jamais entendre ? — Hélas ! répliqua la reine, depuis la mort du roi Joyeux et la perte de ma Joliette, je donnerais bien toutes les nouvelles de ce monde pour une épingle. — Là, là, ne vous chagrinez point, dit la fée, la princesse se porte à merveille ; je viens de la voir ; elle est si belle, si belle, qu’il ne tient qu’à elle d’être reine. Elle lui conta tout le conte d’un bout à l’autre, et la reine pleurait de joie de savoir sa fille si belle, et de tristesse qu’elle fût dindonnière. Quand nous étions de grands rois dans notre royaume, disait-elle, et que nous faisions tant de bombance, le pauvre défunt et moi, nous n’aurions pas cru voir notre enfant dindonnière. — C’est la cruelle Cancaline, ajouta la fée, qui sachant comme je vous aime, pour me faire dépit, l’a mise en cet état ; mais