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AULU-GELLE


rieusement réfléchi sur cette doctrine ; tu te l’es appropriée. Dis-moi maintenant, que fais-tu lorsque tu es surpris par la tempête ? Sans doute tu te rappelles encore ta division, lorsque la voile cède à la force des vents ? mais non ; tu te lamentes. Si, au milieu de tes cris de détresse, quelque mauvais plaisant, s’approchant, te rappelle à ta morale en te disant : Répète-moi donc, au nom des Dieux, ta théorie d’hier : n’est-il pas vrai que le naufrage n’est point un mal ? qu’il n’a aucun rapport avec le mal ? Tu ne frapperais pas cet homme ? tu ne lui dirais pas : Qu’y a-t-il de commun entre nous deux ? Nous périssons, et tu viens plaisanter ?

« On t’accuse, César te cite devant son tribunal, ne va pas au moins oublier ta division ! Mais tu pâlis, tu trembles en franchissant le seuil du palais ! Quoi ? tu trembles ? dira-t-on. De quoi s’agit-il pour toi ? Est-ce que César peut placer le vice ou la vertu dans le cœur de ceux qui paraissent devant lui ? — Laisse-moi, dirais-tu ; pourquoi rire de moi et de mes maux ? — Cependant réponds-moi, philosophe, pourquoi trembles-tu ? Que crains-tu ? la mort, la prison, la torture, l’exil, l’infamie ? car tu ne peux craindre autre chose ? Mais, dans tout cela, il n’y a aucun mal, rien qui ressemble au mal ! N’est-ce pas ce que tu disais ? — De quoi te mêles-tu ? j’ai bien assez de mes maux. —