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VOYAGE D’UNE FEMME AU SPITZBERG.
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les moutons. En se cotisant autour de moi, on est parvenu à me servir du saumon cru, du saumon fumé, du saumon à demi salé, du pain et du beurre ; j’ai dîné avec ce second service, mes trop fréquentes rencontres précédentes avec le saumon sous toute espèce de formes m’ayant depuis plusieurs jours dégoûtée de ce poisson.

La question gastronomique est d’une assez affligeante simplicité en Norwége ; on y mange aussi peu et aussi mal que possible ; passé Christiania, on ne trouve nulle part ni pain ni vin, ces deux bases de tout repas français. Ce qu’on nomme pain, dans ces provinces, n’a aucune analogie avec ce que nous appelons du même nom. Le pain norwégien a la forme et la dimension d’une assiette de porcelaine, il en a presque la consistance ; il est fait de farine d’orge et de seigle et d’une bonne dose de paille. Ces espèces de galettes dures se cuisent à de très-longs intervalles ; on les perce d’un trou au milieu et on les enfile par douzaines dans de longs bâtons suspendus au plafond ; dans les maisons soignées, on les recouvre d’un linge, mais la plupart du temps cette précaution négligée donne beau jeu à la fumée et à la poussière.

Outre ce pain peu appétissant, et auquel je ne me résignai à toucher qu’après un long jeûne, on trouve partout (excepté à Lille-Hammer) des œufs et du lait ; on a souvent aussi du fromage sans sel et du beurre très-salé ; ceci, avec l’immuable saumon, forme le fond du répertoire, assez restreint, comme vous voyez.

Cette pénurie paraît explicable sur un territoire si peu cultivé et si peu peuplé ; les habitations se font