s’il la désire ; et je crois que c’est le cas. Je l’ai entendu faire l’éloge de Jane Fairfax à maintes reprises ! Son anxiété, concernant la santé et l’avenir de la jeune fille, indiquent clairement tout l’intérêt qu’il lui porte. C’est un grand admirateur du talent de Mlle Fairfax : il m’a souvent dit qu’il ne se lasserait jamais de l’entendre chanter. Oh ! j’allais oublier une autre idée. Le piano anonyme, bénévolement attribué aux Campbell ne peut-il pas être un cadeau de M. Knightley ? Je ne puis m’empêcher de le soupçonner.
— M. Knightley ne fait rien mystérieusement.
— Je l’ai entendu plusieurs fois exprimer son regret que Jane n’eût pas un piano.
— C’est possible, mais s’il avait eu l’intention de lui faire ce cadeau, il le lui aurait dit.
— Il peut avoir eu des scrupules de délicatesse. Il me semble me rappeler qu’il s’est montré particulièrement silencieux et réservé pendant le récit de Mme Cole.
— Vous vous emparez d’une idée, ma chère madame Weston, et vous vous échappez avec comme vous me l’avez bien souvent reproché. Je ne distingue aucun signe d’attachement ; je ne crois pas au cadeau et l’évidence seule pourra me faire admettre que M. Knightley ait l’intention d’épouser Jane Fairfax.
Peu à peu, Emma gagnait du terrain ; Mme Weston avait l’habitude de céder dans leurs discussions. À ce moment, il se fit dans le salon un léger brouhaha : on venait, en effet, d’enlever la table à thé et on préparait le piano. M. Cole s’approcha pour prier Mlle Woodhouse de leur faire l’honneur d’essayer le nouvel instrument. Frank Churchill, dont on ne s’était plus occupé pendant sa conversation animée avec Mme Weston et qui avait pris une chaise auprès de Mlle Fairfax, s’approcha à son tour et joignit ses instances à celles de M. Cole. Comme à tous les points de vue, Emma préférait commencer, elle accepta sans difficulté.
Elle connaissait trop bien elle-même les limites de son talent pour tenter plus qu’elle ne pouvait accomplir avec succès ; elle ne manquait pas de goût dans l’exécution des petits morceaux généralement appréciés et elle s’accompagnait bien. Frank Churchill lui fit la surprise