Page:Austen - Emma.djvu/293

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dins s’étendant jusqu’aux prairies traversées par une rivière, les hautes futaies disposées en avenues majestueuses. L’intérieur de la maison était à l’avenant ; toutes les pièces étaient confortables et deux ou trois avaient des proportions imposantes.

Emma interrompit son inspection lorsque le moment fut venu de se joindre aux autres pour la cueillette des fraises. L’assemblée était au complet, sauf Frank Churchill qu’on attendait d’un instant à l’autre. Mme Elton était radieuse sous son large chapeau et tenait son panier à la main ; elle marchait en tête et se disposait à prendre la direction du groupe. Les fraises firent les frais de la conversation et tout en échangeant des remarques sur la qualité et l’arome des différentes espèces cultivées à Donwell, les dames se mirent au travail avec ardeur. Au bout d’une demi-heure, Mme Elton vint s’informer si son beau-fils était arrivé ; elle se sentait inquiète car elle considérait comme peu sûr le cheval que le jeune homme montait.

Quand le soleil eut lassé les plus vaillantes, on chercha un endroit ombragé et tout le monde s’assit en cercle. Mme Elton commença aussitôt à entretenir Jane Fairfax avec animation et Emma entendit qu’il s’agissait d’une situation des plus désirables ; le matin même, Mme Elton avait reçu la nouvelle ; Jane était demandée chez une cousine de Mme Bragge, une connaissance de Mme Sukling. Mme Elton détaillait complaisamment les avantages : famille de premier ordre, meilleures relations, commodités de tous genres ; de son côté, tout était enthousiasme, triomphe, acquiescement et rien ne pouvait l’amener à considérer le refus de son amie comme définitif. Mlle Fairfax, en effet, continuait à assurer à Mme Elton qu’elle ne voulait pas s’engager pour le moment, donnant, une fois encore, les mêmes raisons et les mêmes excuses. Mme Elton n’en persistait pas moins dans sa résolution annoncée de répondre affirmativement par retour du courrier. Emma ne comprenait pas comment Jane pouvait supporter une insistance aussi déplacée ; celle-ci avait pourtant l’air vexée et parlait un peu sèchement ; finalement, avec une décision qui ne