Page:Austen - Emma.djvu/316

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de ses forces et peut-être s’en rend-elle compte, tout en ne voulant pas l’avouer. Elle est complètement abattue. Elle vit actuellement dans un milieu contre indiqué pour une maladie de ce genre ; elle reste confinée dans la même chambre et son excellente tante – une très vieille amie à moi – n’est pas, il faut le reconnaître, une garde-malade adaptée ; les soins dont on l’accable procurent, je crains, à Mlle Fairfax plus de fatigue que de confort !

Emma, en écoutant M. Perry, sentit sa pitié augmenter et chercha le moyen d’être utile à la jeune fille ; elle pensa que le mieux serait de la soustraire momentanément à la compagnie de sa tante et de lui procurer un changement d’air ; dans ce but, le lendemain matin, elle écrivit de nouveau à Jane Fairfax dans les termes les plus amicaux pour lui dire qu’elle comptait passer la prendre en voiture : « Veuillez, ajoutait-elle, fixer l’heure vous-même ; j’ai l’approbation de M. Perry : celui-ci juge qu’une promenade en voiture fera du bien à sa malade. »

La réponse suivit, brève et impersonnelle : « Mlle Fairfax présente ses compliments à Mlle Woodhouse, elle la remercie et regrette de ne pas se sentir assez bien pour prendre le moindre exercice. »

Emma tout en se rendant compte que sa lettre aurait mérité mieux, ne prit pas offense de cette nouvelle manifestation de nervosité et elle se proposa de surmonter une répugnance aussi anormale à être aidée et distraite. Malgré la réponse négative, elle commanda la voiture et se fit conduire chez Mlle Bates, dans l’espoir que Jane se laisserait persuader. Mlle Bates descendit parler à Emma à la portière de la voiture, elle se répandit en remerciements pour une attention aussi flatteuse et demeura d’accord avec Mlle Woodhouse sur l’opportunité d’une promenade sans fatigue : tout fut essayé pour amener Mlle Fairfax à changer d’avis, mais en vain ! Au moment où Emma allait exprimer le désir d’être au moins admise à voir Mlle Fairfax, Mlle Bates laissa échapper qu’elle avait promis à sa nièce de ne laisser monter Mlle Woodhouse sous aucun prétexte. « À la vérité, la pauvre Jane ne peut supporter aucune visite – toutefois Mme Elton a tellement insisté,