Page:Austen - Emma.djvu/381

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renté n’est sans doute pas plus relevée que celle du jeune homme, et de toute façon elle lui est certainement inférieure au point de vue de la respectabilité et du caractère. C’est la surprise qui m’a fait garder le silence. J’avais des raisons de croire, tout dernièrement encore, qu’elle était bien éloignée de penser à lui !

— Vous devez connaître votre amie mieux que moi, reprit M. Knightley, mais, si je ne me trompe, c’est une aimable et tendre personne : elle ne doit pas être portée à se montrer cruelle envers un jeune homme qui lui fait l’aveu de sa passion.

— Sur ma parole, vous la connaissez à merveille. Mais, Monsieur Knightley, êtes-vous bien sûr qu’elle l’ait accepté définitivement ? N’avez-vous pas mal compris ? Vous avez parlé de beaucoup de choses : affaires, exposition de bestiaux, nouvelles méthodes ; peut-être ses affirmations catégoriques ne concernaient-elles pas l’acceptation d’Henriette, mais les dimensions de quelque taureau fameux.

— C’est un peu fort ! reprit M. Knightley en riant, prétendriez-vous insinuer que je ne comprends pas ce qu’on me dit ? Il n’y avait pas, je vous assure, d’équivoque possible. Je crois pouvoir vous en donner une preuve ; il m’a demandé mon opinion sur les démarches à faire ; il comptait s’adresser à Mme Goddard pour avoir des éclaircissements sur les amis d’Henriette. Je ne puis qu’approuver. Il doit aller chez Mme Goddard aujourd’hui même.

— Je suis parfaitement satisfaite, reprit Emma en souriant de bon cœur, et je leur souhaite sincèrement tout le bonheur possible.

— Vous êtes bien changée depuis notre dernier entretien.

— Je l’espère ; dans ce temps-là j’étais stupide !

— De mon côté, j’ai modifié mon opinion. J’ai souvent causé avec Henriette ; par égard pour vous et par intérêt pour Robert Martin, je dé-