Page:Austen - La Famille Elliot T2.djvu/255

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l’amour véritable avec des caprices, des préférences, des coquetteries, qui sont égaux chez les deux sexes, et se succèdent les uns aux autres ; mais quant à l’amour, j’avoue que je crois, au contraire, qu’il est plus vif et plus durable chez les hommes que chez les femmes ; je crois qu’il y a une analogie, un rapport entre les forces vitales et morales, et que notre nature physique étant plus forte que la vôtre, il en est de même de nos sentimens, qui supportent sans s’affaiblir le choc des circonstances, comme nous supportons les orages et les tempêtes.

— Vos sentimens peuvent en effet être plus forts, plus violens, répliqua Alice ; mais les nôtres sont plus tendres et par conséquent plus durables. L’orage renverse le chêne, et le faible roseau plie et ne rompt jamais. Les hommes sont plus robustes que les femmes, et n’ont pas une aussi longue vie, ce qui explique exactement ce que je voulais dire sur la nature de leurs attachemens : j’irai plus loin ; il serait trop dur pour vous qu’il en fût autrement ; vous avez dans votre activité assez de difficultés, de privations et de dangers pour conserver votre existence ; vous êtes toujours livrés au travail, exposés à mille périls ; vous quittez votre maison, votre pays, vos amis ; ni votre