Page:Austen - Les Cinq filles de Mrs Bennet.djvu/101

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lins m’excusera, mais il n’a certainement rien à me dire que tout le monde ne puisse entendre. Je vais moi-même me retirer.

— Non, non, Lizzy ! Quelle est cette sottise ? Je désire que vous restiez. — Et comme Elizabeth, rouge de confusion et de colère, continuait à gagner la porte, Mrs. Bennet ajouta : — Lizzy, j’insiste pour que vous restiez et que vous écoutiez ce que Mr. Collins veut vous dire.

La jeune fille ne pouvait résister à une telle injonction : comprenant, après un instant de réflexion, que mieux valait en finir au plus vite, elle se rassit et reprit son ouvrage pour se donner une contenance et dissimuler la contrariété ou l’envie de rire qui la prenaient tour à tour.

La porte était à peine refermée sur Mrs. Bennet et Kitty que Mr. Collins commençait :

— Croyez, chère miss Elizabeth, que votre modestie, loin de me déplaire, ne fait à mes yeux qu’ajouter à vos charmes. Vous m’auriez paru moins aimable sans ce petit mouvement de retraite, mais laissez-moi vous assurer que j’ai pour vous parler la permission de votre respectable mère. Vous vous doutez sûrement du but de cet entretien, bien que votre délicatesse vous fasse simuler le contraire. J’ai eu pour vous trop d’attentions pour que vous ne m’ayez pas deviné. À peine avais-je franchi le seuil de cette maison que je voyais en vous la compagne de mon existence ; mais avant de me laisser emporter par le flot de mes sentiments, peut-être serait-il plus convenable de vous exposer les raisons qui me font songer au mariage et le motif qui m’a conduit en Hertfordshire pour y chercher une épouse.

L’idée du solennel Mr. Collins « se laissant emporter par le flot de ses sentiments » parut si comique à Elizabeth qu’elle dut faire effort pour ne pas éclater de rire et perdit l’occasion d’interrompre cet éloquent discours.