Page:Austen - Les Cinq filles de Mrs Bennet.djvu/166

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Mrs. Collins, bien qu’à leur aise, ne le sont pas au point de se permettre de fréquents déplacements, et je suis sûre qu’il faudrait que la distance fût réduite de moitié pour que mon amie s’estimât à proximité de sa famille.

Mr. Darcy rapprocha un peu son siège d’Elizabeth :

— Quant à vous, dit-il, il n’est pas possible que vous soyez aussi attachée à votre pays. Sûrement, vous n’avez pas toujours vécu à Longbourn.

Elizabeth eut un air surpris. Mr. Darcy parut se raviser. Reculant sa chaise, il prit un journal sur la table, y jeta les yeux, et poursuivit d’un ton détaché :

— Le Kent vous plaît-il ?

Suivit alors un court dialogue sur le pays, auquel mit fin l’entrée de Charlotte et de sa sœur qui revenaient de leurs courses. Ce tête-à-tête ne fut pas sans les étonner. Darcy raconta comment il avait, par erreur, dérangé miss Bennet, et après être resté quelques minutes sans dire grand’chose, prit congé et quitta le presbytère.

— Qu’est-ce que cela signifie ? demanda Charlotte aussitôt après son départ. Il doit être amoureux de vous, Eliza, sans quoi jamais il ne viendrait vous rendre visite si familièrement.

Mais lorsque Elizabeth eut raconté combien Darcy s’était montré taciturne, cette supposition ne parut pas très vraisemblable, et on en vint à cette conclusion : Darcy était venu parce qu’il n’avait rien de mieux à faire.

À cette époque, la chasse était fermée. Dans le château, il y avait bien lady Catherine, une bibliothèque et un billard ; mais des jeunes gens ne peuvent rester enfermés du matin au soir. Que ce fût la proximité du presbytère, l’agrément du chemin qui y conduisait ou des personnes qui l’habitaient, toujours est-il que le colonel Fitzwilliam et Mr. Darcy en firent dès lors le but presque quotidien de leurs promenades. Ils arrivaient à toute heure, tantôt ensemble et tantôt sépa-