Page:Austen - Les Cinq filles de Mrs Bennet.djvu/28

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pas ? s’exclama-t-il. Mr. Darcy, laissez-moi vous présenter cette jeune fille comme une danseuse remarquable. Devant tant de beauté et de charme, je suis certain que vous ne vous déroberez pas.

Et, saisissant la main d’Elizabeth, il allait la placer dans celle de Mr. Darcy qui, tout étonné, l’aurait cependant prise volontiers, lorsque la jeune fille la retira brusquement en disant d’un ton vif :

— En vérité, monsieur, je n’ai pas la moindre envie de danser et je vous prie de croire que je ne venais point de ce côté quêter un cavalier.

Avec courtoisie Mr. Darcy insista pour qu’elle consentît à lui donner la main, mais ce fut en vain. La décision d’Elizabeth était irrévocable et sir William lui-même ne put l’en faire revenir.

— Vous dansez si bien, miss Eliza, qu’il est cruel de me priver du plaisir de vous regarder, et Mr. Darcy, bien qu’il apprécie peu ce passe-temps, était certainement tout prêt à me donner cette satisfaction pendant une demi-heure.

Elizabeth sourit d’un air moqueur et s’éloigna. Son refus ne lui avait point fait tort auprès de Mr. Darcy, et il pensait à elle avec une certaine complaisance lorsqu’il se vit interpeller par miss Bingley.

— Je devine le sujet de vos méditations, dit-elle.

— En êtes-vous sûre ?

— Vous songez certainement qu’il vous serait bien désagréable de passer beaucoup de soirées dans le genre de celle-ci. C’est aussi mon avis. Dieu ! que ces gens sont insignifiants, vulgaires et prétentieux ! Je donnerais beaucoup pour vous entendre dire ce que vous pensez d’eux.

— Vous vous trompez tout à fait ; mes réflexions étaient d’une nature beaucoup plus agréable : je songeais seulement au grand plaisir que peuvent donner deux beaux yeux dans le visage d’une jolie femme.

Miss Bingley le regarda fixement en lui demandant quelle personne pouvait lui inspirer ce genre de réflexion.