Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/116

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

obtenir une réponse plus favorable que celle dont vous venez de m’honorer ; mais je suis loin de vous accuser de cruauté ; je connais les femmes, et je crois même, que pour une première demande, vous m’avez encouragé autant que la délicatesse de votre sexe le permet.

— De bonne foi, monsieur Colins, repartit-elle vivement, vous confondez toutes mes idées, si ce que je viens de dire vous paraît un encouragement. Quels termes faut-il employer pour vous exprimez mon refus ?

— Vous me permettrez, ma belle cousine, de ne voir dans votre refus que de vains mots. J’ai quelques raisons de penser ainsi ; je ne puis imaginer, que je sois en aucune manière indigne de vous, ou que l’établissement que je vous offre ne soit pas très avantageux ; mon état, mes liaisons avec la famille de Brough, ma parenté avec la vôtre, militent en ma faveur, et vous devriez aussi considérer, que malgré tous vos charmes, il n’est nullement certain, que jamais on vous fasse une pareille demande ; la modicité de votre dot détruira malheureusement tout l’effet que pourraient d’ailleurs produire votre beauté et vos vertus ; de tout cela, il m’est donc permis de conclure, que vous ne m’avez pas parlé sérieusement, et je me plais à ne trouver dans votre refus que le désir d’enflammer mon amour par l’incertitude, selon l’usage constant des femmes de bon ton.

— Je vous assure, monsieur, que mes prétentions au bon ton ne vont point jusqu’à vouloir tourmenter un honnête homme ; en croyant à ma sincérité, vous me rendrez plus de justice ; encore une fois, et cent fois, je vous remercie du choix dont vous m’avez honorée ; en profiter m’est impossible, tous mes sentiments s’y opposent ; puis-je parler plus clairement ? Ne me croyez pas maintenant une femme du bon ton, décidée à vous chagriner, mais une personne raisonnable qui vous parle à cœur ouvert.

— Toujours charmante ! s’écria-t-il, d’un air qu’il croyait être de la plus fine galanterie, et je me persuade que ma demande, lorsqu’elle sera sanctionnée par l’