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Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/195

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chapitre 34


Lorsqu’ils furent partis, Élisabeth, comme si elle eût désiré accroître encore son ressentiment contre M. Darcy, choisit pour occupation l’examen des lettres qu’Hélen lui avait écrites depuis son arrivée dans Kent. Ces lettres ne contenaient aucune plainte réelle : Hélen ne parlait point des événements passés, ni de ce qu’elle souffrait encore, mais chaque phrase, chaque ligne, trahissait sa tristesse : on n’y remarquait plus cette naïve gaieté qui autrefois caractérisait son style, et qui, provenant du doux calme d’une âme en paix avec soi-même et avec tout le monde, avait rarement été altérée. Élisabeth lut et relut les endroits qui pouvaient lui donner la moindre preuve de l’inquiétude de sa sœur, avec une attention que rarement elle accordait à une première lecture. L’idée que M. Darcy s’était vanté des chagrins qu’il avait pu causer, lui fit sentir plus vivement les peines d’Hélen ; elle trouvait quelque consolation à penser qu’il devait quitter Rosings le surlendemain, et une plus grande, en songeant que, dans quinze jours, elle serait elle-même avec cette chère Hélen, et pourrait, par les soins les plus tendres, contribuer à lui rendre sa tranquillité.

Elle ne pouvait penser au départ de Darcy, sans se rappeler aussi que son cousin devait l’accompagner. Mais le colonel Fitz-William avait assez clairement fait entendre qu’il ne songeait point à elle et, quelque aimable qu’il fût, elle n’était nullement disposée à se désoler pour lui.

Cependant elle y rêvait encore, lorsque soudain le bruit de la sonnette de la porte vint mettre fin à ses réflexions.